16/04/2018

Julie, la "compagnonne" du réseau R.E.P.A.S.


A 33 ans, Julie a décidé de rompre son cursus professionnel en quittant son emploi de cadre-animatrice enfance, son appartement, sa vie et son ancrage urbain à Toulouse. Elle s'engage dans un parcours de compagnonnage de huit mois, au sein du réseau R.E.P.A.S, Réseau d'Echange et de Pratiques Alternatives et Solidaires.


Julie raconte le Compagnonnage Alternatif et Solidaire.

Ecoutez l'article  (7.12 Mo)

Nous rencontrons Julie au Champ commun, coopérative autogérée, exploitant depuis 2010 une épicerie, brasserie, bar-café. C'est un pôle d'animation incontournable sur la petite commune de Augan dans le Morbihan,1500 habitants. Elle achève une période d'immersion de cinq semaines, première étape de son parcours de Compagnonnage Alternatif et Solidaire. 
"Le compagnonnage, apprend-on sur le site du réseau R.E.P.A.S, s’adresse à des personnes désireuses de comprendre et d’expérimenter les enjeux et conditions d’existence d'une structure autogérée.Une personne peut rejoindre le parcours dès lors qu’elle nourrit des questionnements critiques autour du travail et des rapports sociaux qu’il génère."

Comme les quinze autres compagnons et compagnonnes qui constituent la promotion 2018, Julie attend de ce parcours de formation action une clarification de son projet d'activité, plus largement un soutien à la réorientation de son parcours et mode de vie.

Voir aussi le reportage d'Histoires Ordinaires le 18/09/2014 sur Le Champ Commun.

Comme Julie, vous rêvez d'un autre rapport au travail et à la formation, alors regardez et écoutez-la vous conter son expérience de compagnonne. 

Pour Julie, tout a commencé en Afrique, à 18 ans.

Apprendre de l'expérience, c'est ainsi que Julie a toujours appréhendé sa formation. Dès le Lycée, passionnée par l'Afrique, elle participait à des projets humanitaires. Ainsi, à 18 ans, elle part au Burkina Faso pour une mission de volontaire en soutien scolaire. "Un belle période de remise en question de mes modes de vie, de mes croyances", souligne-t-elle. Cette expérience nourrit son intérêt pour la pédagogie et la sociologie.

Originaire de la banlieue parisienne, après le bac et une année préparatoire à l'IUFM, elle s'est finalement engagée dans des études de sociologie. Toujours désireuse de confronter ses savoirs à la pratique, elle repart en Afrique, cette fois-ci au Mali, avec une question de recherche : comment s'entretient le mythe de la France chez les candidats à l'émigration. Elle veut comparer les discours qu'ils tiennent sur leur conditions de vie quand ils sont en France puis quand ils retournent dans leur famille au pays. "C'était passionnant en terme de découverte et de rencontres humaines, se rappelle Julie, mais je me suis vite aperçue que mon hypothèse, construite sur mon expérience du Burkina, ne tenait pas. Ces deux peuples ont des modes de vie très différents." Elle ne peut donc valider son mémoire. "Les profs , se rappelle-t-elle, m'ont dit que de toute façon ma démarche était trop anthropologique, pas assez sociologique ".

Qu'à cela ne tienne, Julie décide de bifurquer et s'inscrit en licence d'anthropologie à l'Université de Bordeaux. L'occasion d'un second séjour au Mali. "Je suis allée questionner les habitants d'un village sur l'importance pour eux d'une radio locale ". Toute l'année, Julie s'était intéressée au fonctionnement d'une radio communautaire bordelaise. Forte de cette expérience, elle proposait à une association qui gérait depuis vingt ans une radio dans un village africain, de mieux connaître ses auditeurs et de mesurer l'impact de ses émissions. "C'était une vraie radio de service, toute la communication entre les habitants du village passait par ce média ". Suite au mémoire d'étude de Julie, l'association obtient un financement de l'ONU pour réhabiliter l'antenne de la radio.

Depuis qu'elle travaille, Julie conduit des actions d'éducation populaire

Malgré son intérêt pour les études d'anthropologie, Julie ne poursuit pas en master 2 :  "Il fallait que je m'autofinance et ce n'était pas possible en suivant la fac."  Alors elle se réoriente et prépare, en formation qualifiante en alternance rémunérée, le DEJEPS (diplôme d'études jeunesse, éducation populaire, sports). Elle se forme à la coordination de projet de développement sur les territoires et en réseau. Son stage pratique se déroule d'une part en MJC et avec l'association Sol Africa. Elle va encadrer un groupe de jeunes Toulousains pour qu'ils se forment, par la pratique, à l'accompagnement de projets humanitaires. " L'idée était de leur apprendre à transmettre des connaissances en expérimentant". Julie renoue là avec son intérêt  pour la pédagogie : "Dans mon enfance, je rêvais de devenir institutrice. C'est pourquoi, au début de mes études, j'avais pensé passer le concours de l'IUFM. Mais j'ai été très déçue par les cours préparatoires où jamais on ne parlait de pédagogie mais seulement des disciplines. Je n'avais pas envie de transmettre des savoirs, mais plutôt de transmettre des valeurs, de développer l'esprit critique des enfants." C'est dans l'éducation populaire qu'elle pourra le mieux éprouver cette orientation.
 
Son DJEPS en main, elle trouve un emploi de directrice adjointe au CLAE de Toulouse (centre de loisir associé à l'école) qui accueille 300 enfants et emploie 20 animateurs.trices) géré par le CMEA : "Dans cette fonction, j'ai pu réinvestir mon approche inter-culturelle et ma forte sensibilité à l'écologie."
 
Ses 35 heures d'activité professionnelle au CLAE lui laissent des loisirs. Elle s'engage alors bénévolement comme directrice de chantiers à l'association Etudes et Chantiers. " Là, j'ai appris plein de choses sur le vivre ensemble sur un chantier et éprouvé le plaisir de travailler en plein air." Le management des chantiers de volontaires mais aussi la gouvernance de l'association Etudes et Chantiers,  fonctionnent selon les principes de l'horizontalité et de l'autogestion. "En comparant avec la manière dont nous fonctionnions au CLAE,  je me suis posée des questions sur le fonctionnement hiérarchique. Avec des membres d'Etudes et chantiers, on s'est mis à réfléchir à comment nous aimerions travailler : avoir un engagement plus physique , moins intellectuel, construire, faire de la cuisine, pétrir et cuire le pain... à notre rythme, sans devoir répondre à des commandes extérieures. Faire à notre image..." Emergent donc plein de projets, à conduire seule ou en collectif. 

Pour répondre à cette aspiration,  Julie ressent - après six années au travail - le besoin de se former à nouveau, mais à sa manière... "Je prends la décision de quitter mon travail pour un an de woofing".  J'avais besoin de voir comment je me comporterais sur des activités concrètes, techniques." Alors elle séjourne chez un couple et contribue au travaux de rénovation de leur maison. "Avec eux, précise Julie, j'ai aussi découvert la production et la vente de plantes médicinales. Ils m'ont appris comment on pouvait en vivre."

C'est ce couple qui informe Julie sur l'existence du réseau R.E.P.A.S dont elle devient "compagnonne", en février 2018.


Interview à voir et partager sur la
chaîne Youtube d'Histoires Ordinaires

 

Reportage
Alain JAUNAULT


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