Si vous tapez « location de jouets » sur Google au moins trois sites vous proposent le service. Stéphane Cozic, en lançant EcoJouets le 19 Janvier 2009 (voir le site ICI) a cependant été un défricheur : « Au moment où j’y ai pensé, cela n’existait pas » insiste-t-il.
Un projet fondé sur des valeurs
C’est de son expérience de jeune papa – Stéphane a deux enfants – qu’il tire l’idée de location de jouets : « Avec mon épouse, jusqu’au dix mois de Titouan, nous achetions des jouets chaque mois. Or, malgré la dizaine de jouets en sa possession, mon fils ne consacrait qu’à peine quelques minutes à “ce stock”. L’emballage du jouet avait parfois plus d’attrait que le jouet lui-même ! » Finalement le couple trouve « un peu stupide d’acheter autant de jouets si peu utilisés ».
Au delà de cette réflexion de bonne économie domestique Stéphane et sa femme ont une vision pédagogique de l’accès au jouet : « Avant 2 ans un enfant ne sait pas partager. Cette valeur n’est pas innée elle doit s’acquérir ». Le prêt ou la location constituent une occasion d’apprentissage du “partage”.
Ils s’interrogent alors sur les solutions qui s’offrent aux parents. Bien sûr ils se sont intéressés aux Ludothèques qui, à l’instar des bibliothèques publiques, pratiquent depuis longtemps le prêt de jouets. Ils leur trouvent cependant des limites. D’abord tout le monde n’y a pas accès près de chez soi. Mais surtout, en parents modernes, ils trouvent que : « les jouets proposés ne sont pas très actuels. Il s’agit souvent de jouets en bois ou de jeux de société. L’offre en matière de jouets électroniques ou interactifs est très rare alors qu’ils répondent aux attentes de la nouvelle génération de parents ». De plus la durée de prêt est souvent courte, et les modalités pas assez souples… Toutes limites que prétend dépasser le service d’EcoJouets qui devra cependant faire ses preuves auprès d’un public attaché au projet social et de service public des ludothèques.
En militant d’une consommation éco-responsable, Stéphane Cozic veut croire qu’il y a de plus en plus de parents – et de grands parents – qui « remettent en cause la consommation de masse, sans borne ». S’appuyant sur les conclusions des dernières études du CREDOC et de l’Institut des Mamans, il relève que « les parents veulent consommer responsable et (que) la notion d’éthique prend de l’importance ».
C’est sur ces bases que le concept d’EcoJouet a pris forme, petit à petit. Mais encore fallait-il savoir passer de l’idée, bien dans l‘air du temps, à la prise de risque de création d’entreprise.
Trois ans pour réussir
Cadre, contrôleur de gestion, dans une société de distribution de matériel informatique cela faisait un certain temps que Stéphane était en désaccord avec ce qu’il observait dans son travail : « les prix qui baissent, le tassement de la marge, entraînent la réduction des moyens pour bien accueillir les clients et les conseiller. » Profitant d’une restructuration interne il négocie son départ. «J ’avais d’autres pistes dans l’univers de la grande distribution, précise-t-il, mais j’étais de plus en plus attiré vers d’autres modes de commerce, plus proches de mes valeurs ». Celles qu’il dit avoir héritées de sa mère, petit commerçante, « pour qui le client était le centre de l’entreprise ».
« Il faut du temps pour que les consommateurs s’approprient un nouveau mode de consommation », constate Stéphane un an après le lancement. « Faire changer les mentalités est très difficile. Nous sommes très terriens en France ». Alors il va prendre son temps : « Je me suis donné trois ans pour réaliser ce challenge ».
Il investit 25 000 € dans le capital de la SARL qu’il crée et assumera seul, en artisan, le développement du projet : « En dehors de la partie technique que j’ai sous-traitée à un web master, précise Stéphane, je fais tout : négociations avec les fournisseurs, logistique, relations clients, SAV, publicité et relations presse… ».
Cette dernière activité est essentielle à la visibilité du service sur Internet et Stéphane se révèle un très bon communicant. Le site bénéficie en quelques mois d’une bonne couverture média : Le Figaro, le Monde, France Info, Canal+, Antenne 2… Bonne solution pour être visible sur la toile sans dépenser des milliers d’Euro chez Google.
Un service écologique ?
Mais cette exposition médiatique suffira-t-elle à convaincre des clients sensibles aux valeurs annoncées mais exigeants sur leur mise en œuvre. Ainsi, dans les commentaires aux articles parus sur le site du Monde, certains doutent du caractère réellement éco-responsable de ce commerce qui propose des jouets en plastique, pleins de composants électroniques, sans parler de l’empreinte carbone négative des livraisons à domicile à répétition de colis de jouets ?
« Ecojouets, se défend Stéphane Cozic, ne se définit pas comme un site 100% écologique. C’est un mix entre un concept qui privilégie le développement durable par la réutilisation des jouets et l’accès rendu possible à des jouets souvent onéreux dans le commerce traditionnel ».
Les jouets dits “écologiques” représentent 20% de la gamme. Et il ne lui parait pas possible d’aller rapidement au delà compte tenu de l’offre. Et surtout : « Si les jouets en bois sont souvent très "beaux", l’apport de l’électronique est un vrai "plus" aujourd’hui notamment pour l’apprentissage du langage, de l’audition, la découverte et la créativité.»
Engagé mais réaliste, Stéphane Le COZIC croît que « pour monter un projet qui soit dans une orientation de développement durable, il n’est pas nécessaire de passer par du 100% écologique dans le choix des produits. » Et de conclure : « Le fait de proposer une consommation plus responsable ne contribue-t-elle pas à une amélioration de la santé de notre planète ? »
Magali LE CARRERES, Alain JAUNAULT