Caboche. La sienne est d'un sacré métal ! Un peu comme celui qui résonne aux Chantiers Navals de Saint-Nazaire où le fils d'épiciers de campagne, à peine devenu instituteur, s'avisa un jour de rentrer. Soudeur, électricien, tuyauteur..., quatre ans ouvrier il resta. De l'humain en barres. Là où, depuis toujours, il s'approvisionne : « La matière première du théâtre, c'est l'humanité profonde », confie-t-il en posant son plateau-repas au foyer des jeunes travailleurs.
Mais cette humanité profonde, l'ouvrier la cherchait aussi dans les étoiles. « Il n'y avait pas de livres à la maison, poursuit-il, j'ai commencé à lire à partir de 18-19 ans : quand j'ai découvert la littérature, j'ai eu un appétit vorace. » La littérature a été sa «« première grande découverte ». La seconde a suivi : « Le voyage : j'ai toujours eu envie de rencontrer les gens, rencontrer les cultures du monde. »
Mais cette humanité profonde, l'ouvrier la cherchait aussi dans les étoiles. « Il n'y avait pas de livres à la maison, poursuit-il, j'ai commencé à lire à partir de 18-19 ans : quand j'ai découvert la littérature, j'ai eu un appétit vorace. » La littérature a été sa «« première grande découverte ». La seconde a suivi : « Le voyage : j'ai toujours eu envie de rencontrer les gens, rencontrer les cultures du monde. »
Dans un squat puis une chapelle
Avec tout ça, à partir de 1980, à l'approche de ses 30 ans, le scénario de sa destinée peu à peu se met en place. Passionné depuis toujours par les planches, il entame en amateur puis en semi-professionnel, avec ses deux comparses Martine Libot et Brigitte Prévost, une relation de plus en plus suivie avec la scène. Et, en 1987, le déclic survient. À l'été, une tournée réussie au Québec encourage le trio : en novembre, naît « Le Théâtre du Tiroir des affabulations ».
Le nom s'inspire de la phrase de Jacques Prévert : « Il est grand temps d'ouvrir le tiroir des affabulations, celui qui est sous la chaise. » Le poète Blaise Cendrars est le premier à entrer en scène à partir des contes qu'il a ramenés d'Afrique : Jean-Luc Bansard crée le spectacle « Petits contes nègres pour les petits enfants blancs ».
Le nom s'inspire de la phrase de Jacques Prévert : « Il est grand temps d'ouvrir le tiroir des affabulations, celui qui est sous la chaise. » Le poète Blaise Cendrars est le premier à entrer en scène à partir des contes qu'il a ramenés d'Afrique : Jean-Luc Bansard crée le spectacle « Petits contes nègres pour les petits enfants blancs ».
Le tiroir des affabulations, depuis, ne s'est jamais refermé. A commencé au contraire une épopée lavalloise, nourrie de victoires quotidiennes et de quelques hauts faits. En octobre 1990, Jean-Luc Bansard force l'entrée d'une caserne désaffectée dans le centre de la ville, squatte la salle des fours de la boulangerie et crée un espace permanent de 60 places... Il tiendra jusqu'à la destruction de la caserne. En 1995, grâce à une pétition, le Théâtre emménage dans une ancienne chapelle, rue Jean Macé.
Le nègre, le palestinien, le juif...
Hommage à Mahmoud Darwich, le grand poète palestinien
Il s'y trouve toujours. Au début de l'été 2013, il a pu ainsi fêter ses 25 ans. Huit jours de spectacles rue Jean Macé, sous un chapiteau, mais aussi avec et chez les habitants du quartier. Vingt représentations, 55 artistes français et étrangers sur les 164 ayant travaillé à ce jour avec le Théâtre du Tiroir. Des comédiens, musiciens, acrobates, etc. Venus de Russie, Georgie, Palestine, Algérie, Haïti, Congo, Inde... Des handicapés aussi, des poètes sourds : Jean-Luc Bansard ne connaît aucune frontière.
Avec tous, il « rentre par la porte des grands auteurs ; chaque culture a découvert un grand poète. Avec Aimé Césaire, c'est ma manière d'être un nègre, ma négritude. » Il a beaucoup cheminé avec le grand poète palestinien Mahmoud Darwich, « le poète de l'exil » qu'il a rencontré à Ramallah en juillet 2005. Il a une relation forte avec la Palestine, pays colonisé, sans toit, transpercé de murs en béton ou symboliques. Maints spectacles, maintes collaborations en Cisjordanie ou en France témoignent de cette relation particulière mais Jean-Luc Bansard « ne veut pas être borgne ».
Avec Amit Weisberger qui lui « apporte la culture israélienne juive, non sioniste », il a monté en 2010 « Shlemiel ou la sagesse des fous », des contes yiddish de Pologne : « Après plus de 120 représentations des Contes humoristiques de Palestine, dit-il, j'ai voulu faire connaître l'humour du peuple juif qui, malgré les chasses à l'homme, les déportations, les massacres, a toujours fait preuve de ce qu'on appelle naïvement "l'humour juif." »
Avec tous, il « rentre par la porte des grands auteurs ; chaque culture a découvert un grand poète. Avec Aimé Césaire, c'est ma manière d'être un nègre, ma négritude. » Il a beaucoup cheminé avec le grand poète palestinien Mahmoud Darwich, « le poète de l'exil » qu'il a rencontré à Ramallah en juillet 2005. Il a une relation forte avec la Palestine, pays colonisé, sans toit, transpercé de murs en béton ou symboliques. Maints spectacles, maintes collaborations en Cisjordanie ou en France témoignent de cette relation particulière mais Jean-Luc Bansard « ne veut pas être borgne ».
Avec Amit Weisberger qui lui « apporte la culture israélienne juive, non sioniste », il a monté en 2010 « Shlemiel ou la sagesse des fous », des contes yiddish de Pologne : « Après plus de 120 représentations des Contes humoristiques de Palestine, dit-il, j'ai voulu faire connaître l'humour du peuple juif qui, malgré les chasses à l'homme, les déportations, les massacres, a toujours fait preuve de ce qu'on appelle naïvement "l'humour juif." »
Un spectacle Pouchkine devant des Russes
L'autre grande relation, sans doute, est la Russie. Un jour de 1993, il croise la comédienne spécialiste de la voix Nika Kossenkova : « À chaque fois, souligne-t-il, c'est une rencontre humaine qui décide d'un voyage théâtral. » Il travaille alors sur Tchekhov. « C'est Pouchkine qu'il te faut », lui dit-elle. Il part un mois à Rouza, une petite ville à 90 km de Moscou. Nika fait la mise en scène.
Et il joue Pouchkine, là-bas, devant les Russes ! Un Pouchkine en français mais donnant par le geste toute sa mesure. Dix ans plus tard, en avril 2013, « Histoires malicieuses de Monsieur Pouchkine » a été primé à Moscou et c'est là-bas que Jean-Luc Bansard, qui a pris aussi sous son aile l'artiste russe exilé Yvan Golovin, a entamé la saison 2013 - 2014.
Et il joue Pouchkine, là-bas, devant les Russes ! Un Pouchkine en français mais donnant par le geste toute sa mesure. Dix ans plus tard, en avril 2013, « Histoires malicieuses de Monsieur Pouchkine » a été primé à Moscou et c'est là-bas que Jean-Luc Bansard, qui a pris aussi sous son aile l'artiste russe exilé Yvan Golovin, a entamé la saison 2013 - 2014.
Gilgamesh et l'Odyssée
Dans la salle du théâtre, lors d'un atelier pour enfants
Autant que de l'espace, l'artiste de Laval se joue du temps. Jeune, il a découvert « avec voracité les textes fondateurs de la littérature ». En 2009, il monte « L'épopée de Gilgamesh », le grand texte babylonien, le plus ancien de l'humanité. En 2012, c'est « Ulysse ou les chants du retour ». « Chez Homère, dit-il, il y a toutes les grandes questions philosophiques. » Il a commandé à un philosophe un travail sur l'apport d'Homère dans la société moderne. De Gilgamesh et de l'Odyssée, il a fait un dyptique.
Toujours en voyage, Jean-Luc Bansard a abordé aussi les rives du silence, la culture sourde et sa langue des signes, avec des comédiens malentendants : « Quand je leur ai amené Homère, ils ont creusé Homère comme moi j'ai creusé Homère pour le mettre en scène. » En 2012, c'est devenu au théâtre « le pays du silence ».
Comme il n'y a pas, chez lui, de voyage sans partage, il a gardée intacte, à 61 ans, l'énergie de transmettre. Seul ou avec des collègues, il n'a jamais cessé, en France et à l'étranger, de former, d'animer des ateliers, de donner, à des adultes, des lycéens, des petits. Ce matin, il faisait encore répéter des enfants sur la scène de son théâtre.
Toujours en voyage, Jean-Luc Bansard a abordé aussi les rives du silence, la culture sourde et sa langue des signes, avec des comédiens malentendants : « Quand je leur ai amené Homère, ils ont creusé Homère comme moi j'ai creusé Homère pour le mettre en scène. » En 2012, c'est devenu au théâtre « le pays du silence ».
Comme il n'y a pas, chez lui, de voyage sans partage, il a gardée intacte, à 61 ans, l'énergie de transmettre. Seul ou avec des collègues, il n'a jamais cessé, en France et à l'étranger, de former, d'animer des ateliers, de donner, à des adultes, des lycéens, des petits. Ce matin, il faisait encore répéter des enfants sur la scène de son théâtre.
Ouvrier parmi les siens
Et que tous le sachent : « Qui a un poète dans sa sacoche ne perd pas caboche ! » Tout Jean-Luc Bansard est peut-être dans ce proverbe de son invention. L'artiste goûte aussi la gouaille. Le fou de Dario Fo et Jean Genêt invite régulièrement les Jehan-Rictus et Gaston Couté à son festival « Poètes en caboche », une autre création entre les dizaines que l'on peut retrouver dans la malle à spectacles et le carton à souvenirs du site du théâtre.
Le comédien voyageur reste un ouvrier, il n'a jamais quitté les siens. Le Théâtre du Tiroir est un théâtre de quartier et son directeur, toujours en panne d'argent, transporte volontiers ses tréteaux chez l'habitant, dans une grange de campagne et autres lieux improbables. Parce que tout simplement, « le théâtre populaire donne du sens à la vie ».
Michel Rouger
(Photos de spectacles : Théâtre du Tiroir)
Le programme de la saison 2013 - 2014
« Ulysse, les chants du retour » avec deux comédiens malentendants