Pour Joël Folgoas, bénévole, et Marjorie Poënces, salariée, il y a des points communs quels que soient les quartiers.
La médiation se déroule en deux temps. Il y a d'abord des entretiens préalables. Les médiateurs rencontrent les demandeurs, puis leurs voisins séparément. Ensuite, si les deux parties sont d'accord, une séance de médiation proprement dite est organisée.
« On est sur une démarche volontaire, précise Marjorie Poënces. Une personne va nous solliciter pour un problème de voisinage. Si elle est d'accord pour suivre la démarche, on invite son voisin ou sa voisine à venir nous rencontrer. Mais elle peut choisir de venir ou pas. Si le voisin ne veut pas venir, nous réfléchissons aux autres leviers avec la personne qui nous a sollicité. Ce premier entretien, même s'il n'aboutit pas à une rencontre de médiation, permet de prendre un peu de recul par rapport à la situation ».Chaque médiation est particulière, à propos du bruit, par exemple. Joël Folgoas raconte :
« Monsieur et Madame A, d'une part, et Monsieur et Madame B, d'autre part, participent à une rencontre plénière. Au cours des discussions, Monsieur A est en total accord avec Monsieur et Madame B. Monsieur A avait trouvé de l'aide auprès de Monsieur. et Madame B. Le conjoint ne vit pas les choses de la même façon. Il y a un problème au sein du couple. »
Premier problème, le bruit
Le bruit est la première source de conflit dans les relations de voisinage : des fêtes tardives, les enfants dans la journée ou tard le soir. Avec toutes les conséquences de ce bruit : mal vivre, énervement, fatigue. Puis viennent les questions de mitoyenneté sur des arbres qui dépassent, font de l'ombre... Plus rare, l'hygiène : dans un immeuble, des résidents laissent leur poubelle dans des parties communes. Les emplacements de parking, peuvent aussi faire l'objet de discussions vives. « On parle là de relations inter-individuelles. Les difficultés rencontrées entre deux ou trois foyers. Mais, souligne Marjorie, nous pouvons être amenés à travailler sur des situations plus collectives qui demandent beaucoup plus de temps. L'usage d'un square, par exemple, où des enfants jouent avec des ballons : ils font beaucoup de bruit, ça résonne... Des personnes ont l'impression que ces enfants sont livrés à eux mêmes. »
Marjorie Poënces est l'une des quatre salariées de l'association « Cité et médiation » : Je suis entrée dans l'association comme médiatrice bénévole. Ma formation, c'est le même processus que les médiateurs bénévoles. Après, j'ai intégré l'équipe salariée. Je continue à suivre les mêmes formations. J'ai une formation de développement social. » Elle est en charge de la coordination de l'équipe des médiateurs, de toutes les permanences et des partenariats avec les réseaux locaux dans les différents quartiers..
Rétablir le dialogue
L'association intervient sur l'aspect relationnel de voisinage. L'objectif est d'inviter à mettre un peu de communication entre voisins. « On n'a pas d'expertise en termes juridiques. On n'est pas là pour donner des solutions toutes faites mais pour rétablir le dialogue entre les personnes. On sert de tiers, mais on ne fait pas l'aller-retour entre les personnes. »
« La situation n'est satisfaisante pour personne et tous en souffrent. Nous cherchons à rétablir la qualité d'une relation qui a disparue. Mais a-t-elle existé ? »
Dans un lieu neutre
La rencontre se déroule dans un lieu neutre. La maison de quartier est tout appropriée « Dès le premier entretien individuel, on annonce aux personnes qu'elles vont peut-être rencontrer leur voisin, leur voisine. Peut-être qu'eux aussi auront des choses à leur reprocher. Vous c'est votre point de vue. Le jour de la rencontre, les autres vont dire des choses avec lesquelles vous ne serez pas d'accord. C'est normal. Même si vous n'êtes pas d'accord, c'est important d'entendre ce qu'ils ont à dire pour comprendre pourquoi vous en êtes arrivés là. »
Si l'on se croise, on s'ignore.
« Parfois, poursuit Marjorie, les situations sont tellement tendues que l'on n'arrivera pas à des relations cordiales. Une solution, alors, est d'être d'accord sur le fait que ce n'est pas possible de s’adresser la parole sans s'engueuler. La conclusion : on ne s'adresse plus la parole. Si l'on se croise, on s'ignore ! On est au moins d'accord là-dessus. »La médiation c'est une parenthèse. L'idée est de responsabiliser les personnes.
Des interprètes bénévoles
Parfois, il y a un souci de communication entre des personnes qui parlent français, et qui ont du mal à se comprendre. Parfois ce sont des personnes qui ne maîtrisent pas très bien notre langue. Marjorie explique : « Nous essayons de solliciter des traducteurs citoyens. Cité et médiation n'a pas de budget pour payer des professionnels. On fait appel a des personnes de notre réseau. On essaie aussi d'avoir des bénévoles plurilingues, non professionnels. En contre partie on leur propose une formation de médiation, et de gestion des conflits. On a ainsi intégré, dans l'équipe de médiateurs, une personne qui avait assuré une traduction en arabe .».
Joël Folgoas enseignant en retraite est bénévole à Cité et Médiation depuis une dizaine d'année. « On est des humains et on peut aussi dans nos vies citoyennes rencontrer certains difficultés de relations : chez nos voisins dans des associations...».
Tous les médiateurs sont bénévoles : une vingtaine sur Rennes trois pour Villejean et le secteur Nord-Ouest. Leur profil est varié : des personnes en activité, d'autres à la retraite, des indépendants, plusieurs DRH, des salariés. Leurs métiers aussi sont divers : des enseignants, un avocat, des coach, des informaticiens, retraités SNCF, travailleurs sociaux... Le plus jeune a 26 ans, le plus âgé plus de 75 ans. On est presque à la parité hommes-femmes. Être formé à la médiation, c'est aussi un tremplin au niveau professionnel, dans un CV.
Les colocations, un problème spécifique.
Un point spécifique caractérise Villejean : les colocations. Dans des appartements habitent des propriétaires occupants. A côté, des logements sont en colocation (2). « Comment les étudiants qui arrivent sont accueillis par les copropriétaires ? Il y aurait besoin d'un travail plus approfondi en prévention, par exemple autour d'une charte, ou avec du théâtre forum. »
Jean-François Bourblanc
Les permanences se déroulent à la Maison de quartier de Villejean un jeudi par mois de 18h30 à 21h. Prendre rendez-vous au 02 99 77 68 86. .
(2) Voir aussi « Colocataires et résidents, comment améliorer la cohabitation »
Joël raconte : « Cité et médiation forme les futurs médiateurs. La formation initiale dure 5 jours. Parallèlement à cette formation, les futurs médiateurs sont observateurs. Ils assistent plusieurs médiations avec des médiateurs formés : c'est un apprentissage concret. Il y a la théorie avec des exemples concrets. Mais rien ne vaut les situations de vie. »Une formation continue, plusieurs fois par an complète la formation initiale. Une règle : dans la médiation, la position des médiateurs, est la neutralité. Une des qualités d'un médiateur : l'écoute pertinente.
Les colocations, un problème spécifique.
Jean-François Bourblanc
Les permanences se déroulent à la Maison de quartier de Villejean un jeudi par mois de 18h30 à 21h. Prendre rendez-vous au 02 99 77 68 86. .
(2) Voir aussi « Colocataires et résidents, comment améliorer la cohabitation »
Trois médiatrice et médiateurs interviennent à la Maison de quartier de Villejean: Sophie Boquet, Philippe TIRON, Joël Folgoas
Cité et médiation
Au début, c'était un service qui dépendait de la Ville de Rennes, avec un noyau de médiateurs et médiatrices bénévoles. Elle intervenait seulement sur les quartiers prioritaires. En 2008, l'association Cité et Médiation a été créée pour garder une certaine neutralité. Très rapidement elle s'est ouverte à tous les quartiers de la Ville. Elle employait alors un salarié, puis 2, 3 et 4 aujourd'hui. Au fil des années se sont développés les partenariats, conventions. Une vingtaine de bénévoles participent aujourd'hui aux médiations.