Menu

Anne-Soizic : "S’inquiéter des autres et des générations futures, c'est ça la fraternité !"



Anne-Soizic, 38 ans, est née et vit à Maure-de-Bretagne, dans la ferme même qui a vu naître ses parents et ses grands-parents. Pourtant, plus jeune, ce n’est pas vers l’agriculture qu’elle s’oriente mais vers l’entraide et l’accompagnement de demandeurs d’emploi. En 2012, elle rejoint son mari Yoann, qui a pris la suite de l’exploitation familiale, et crée « La crèmerie d’Ana-Soiz ». C'est aujourd'hui une famille d’agriculteurs heureux...


anne_1.mp3 Anne-1.mp3  (10.08 Mo)


Anne-Soizic : "S’inquiéter des autres et des générations futures, c'est ça la fraternité !"
Liberté

« La liberté, c’est choisir sa vie, choisir son métier, rêver son projet sans être soumis, mener sa barque jusqu’au bout… contre vents et marées. En se donnant les moyens, on a la chance en France de s’informer librement, de se former et de s’éduquer. La culture est arrivée dans nos campagnes et ouvre des portes de manière égalitaire. Mais c’est vrai : il faut s’en donner les moyens et peut-être que tout le monde ne peut pas le faire. J’apprécie d’avoir pu mener mon projet, aller au bout de mon désir d’entreprendre. Ça, c’est de la liberté. J’ai toujours pu faire librement ce que je voulais. Tout n’allait pas toujours dans le sens où je voulais aller. Je n’ai pas toujours croisé des personnes qui croyaient en mon projet mais ça m’a obligée à m’affirmer, à asseoir mes idées. C’est devenu un combat et ça m’a rendu plus forte.
 
Egalité
 
Mes parents m’ont transmis des valeurs que j’ai fait miennes et que je transmets à mes enfants. La valeur travail, elle est chez nous bien intégrée ! Tout comme l’engagement, la conviction, la ténacité… Ce sont des forces que nous avons tous les deux, avec mon mari Yoann, sinon notre projet ne tiendrait pas. Chacun a ses domaines de compétences et on n’empiète pas sur le domaine de l’autre mais on se complète bien.
 
Fraternité
 
Choisir de produire en bio, c’est penser à l’environnement, c’est aussi s’inquiéter des autres et des générations futures. Beaucoup de mal a été fait et sans doute ne pourra-t-on pas tout réparer… Essayons d’agir durant notre passage sur terre, de contribuer à faire changer les choses. Il y a dans le réseau Invitation à la ferme, que nous avons créé, quelque chose de fraternel. C’est possible de vivre de la fraternité même au sein d’une activité professionnelle. Il y a quelque chose entre nous qui nous relie, qui est plus fort que l’économique. On met au pot commun des convictions, des valeurs… des recettes ! Ensemble, on est plus fort… »
 

ANNE-SOIZIC, L'AME D'UNE BATTANTE

Titulaire d’un BTS d’assistante de gestion, passé au lycée La Mennais de Ploërmel, Anne-Soizic travaille tout d’abord à l’Acdes, association intermédiaire de Maure-de-Bretagne, comme chargée d’insertion. Pendant ce temps, Yoann son mari, 38 ans, originaire de Noyal-Châtillon, prend la suite des parents d’Anne-Soizic sur l’exploitation familiale. Le commercial a choisi la terre et délaissé la vente de machines agricoles. Titulaire d’un BTS en machinisme agricole, passé au lycée de Saint-Hilaire-du-Harcouët et, d’un bac agricole suivi par correspondance, il exploite les 70 hectares qui permettent d’élever 45 vaches laitières. En 2010, il obtient la reconversion de l’exploitation en bio et crée en complément, un petit atelier de poules pondeuses avec vente directe d’œufs à la ferme.
 
Le souhait de devenir agricultrice 
 
L’affaire prospère et Anne-Soizic envisage bientôt de rejoindre son mari : « C’est un métier qui m’attirait, confie la jeune exploitante. Et aussi, un nouveau projet de vie qui nous convenait bien, à nous et à nos trois enfants. » Grâce à un congé emploi formation, Anne-Soizic reprend les études, par correspondance cette fois, et obtient un bac agricole avec l’option transformation de produits laitiers. En 2012, elle a chaussé les bottes et rejoint son mari sur l’exploitation : « On passe à 60 vaches laitières et 95 hectares, une structure normale pour faire vivre une famille. Le but est de s’auto-suffire. Rapidement, nous sommes devenus quasiment autonomes pour l’élevage, en privilégiant pour les vaches le pâturage. ».

"Pas question de foncer tête baissée !"

Mais Anne-Soizic rêve de créer sa propre activité au sein de l’exploitation : « J’ai pensé à une yaourterie pour valoriser le lait bio que nous produisions. J’avais la formation pour et tous les voyants étaient au vert. » Un long travail de réflexion et d’étude s’engage. Accompagnée par la chambre d’agriculture, Anne-Soizic brasse les chiffres, analyse le marché et les clients potentiels, passe en revue tous les paramètres : « Pas question de foncer tête baissée ! Je suis retournée me former à la Lande du Breuil du groupe Antoine de Saint-Exupéry. Il me fallait un dossier solide pour convaincre les banques et obtenir un prêt. »
 
Supprimer les intermédiaires

Deux sur les trois organismes financiers sollicités acceptent d’accompagner Anne-Soizic. La barre est haute car il faut 170 000 € pour construire le laboratoire, 40 000 € pour acheter le matériel de la yaourterie, 350 000 € pour améliorer les conditions de logement des vaches laitières. « Ça ne m’a pas effrayée ! J’ai plutôt l’esprit d’entreprise et suis d’un naturel confiant ! » Les travaux démarrent en 2013. La yaourterie ouvre un an plus tard, en avril 2014, "La crèmerie d’Ana-Soiz". Au début, les nuits sont courtes ! « Debout 5 h jusqu’à… 22 h ! » Anne-Soizic et Yoann, qui ont décidé d’assumer toute la chaîne de fabrication, les céréales pour nourrir les vaches, l’élevage, la production du lait et la transformation en yaourt, ont fort à faire. Mais le produit est bon et les clients sont au rendez-vous.
 
Deux emplois sont créés

Le service de remplacement leur vient en aide au démarrage ; en novembre 2015, un ouvrier spécialisé agricole est embauché pour assister la conduite de l’élevage. Puis, en mars 2016, une autre personne est embauchée pour assurer la livraison de produits. La yaourterie démarre à 7 h : « Le lait est monté en température, on ajoute ensuite les ferments puis on conditionne en pots. Nous produisons aujourd’hui des yaourts nature mais aussi aux fruits, des crèmes dessert, des fromages blancs. Nous avons lancé trois nouveaux produits en août dernier : riz au lait, crème café, crème caramel au beurre salé. Tout est bio ! » Le tiers de la production laitière est transformé tandis que les deux autres tiers sont vendus en laiterie. 80.000 litres sont actuellement transformés ; le couple envisage de pouvoir en transformer jusqu’à 150.00 litres par an. 

Valeurs partagées au sein d'un réseau 

Rapidement, Anne-Soizic rejoint le réseau Invitation à la ferme  : « Il a été créé par cinq agriculteurs bretons, tous en bio, à l’initiative de Jean-Michel Peard. Le but est de mutualiser nos forces de production et proposer, dans toute la France, un ensemble de produits bio en grandes et moyennes surfaces. » Depuis, la marque "La Ferme d’Ana-Soiz" est également commercialisée dans les écoles, les lycées et restaurants d’entreprise : « Les produits se présentent avec le même packaging et la même identité visuelle pour nous tous. Régulièrement, on se retrouve, on échange nos idées, nos pratiques, des recettes. On mutualise des moyens et des ressources. Un ingénieur production est à notre disposition comme appui technique. Nous sommes quinze producteurs et partageons les mêmes valeurs. Notre fierté avec Yoann ? Avoir réussi à créer deux emplois, vivre de notre travail avec des produits de qualité et concrétiser ce qui était notre projet de vie... »
 
Propos recueillis par Jean-Yves Geffroy et Tugdual Ruellan.
 
La Ferme de Meul’n
Anne-Soizic et Yoann Liger
47, Saint-Melaine - 35330 Maure de Bretagne
Tél. 06 85 40 44 11 - vente à la ferme le vendredi, de 16h à 19h
www.ana-soiz.com
 
 



1.Posté par Yvonik Lorcy le 02/12/2016 13:43
Merci pour cette interview qui donne « la frite » pour toute la journée !
Bien amicalement, Yvonick Lorcy, CNEAP.

Nouveau commentaire :


Pourquoi ce blog ?
Michel Rouger
Et si l’on demandait à chacun d’entre nous ce qu’évoque la devise républicaine, ces trois petits mots, parfois bafoués, souvent mis à mal quand ils ne sont pas oubliés de nos frontons publics ? Et si l’on prenait le temps de s’interroger sur le sens qu’ils prennent ou qu’ils ont pris dans nos vies ?

Alors, les citoyennes et les citoyens nous diraient leur mécontentement, parfois leur colère de n’être pas considérés, entendus, écoutés. Ils nous diraient leurs peurs et leur fragilité dans une économie mondialisée, monétisée, déshumanisée. Ils hurleraient leurs doutes, leur mépris face aux promesses qui leur sont faites et qui ne sont pas tenues.

Mais ils nous diraient aussi leur joie d’être libres, de pouvoir dire, rêver, encore et toujours penser. Ils nous diraient malgré tout leur espoir de voir poindre des jours meilleurs, leur soif et leur espérance de justice et d’égalité.

A l’initiative du député Jean-René Marsac, nous sommes allés recueillir des paroles, des histoires de vie, des réflexions glanées sur ces bouts de chemin croisés. Histoires Ordinaires propose de les mettre en partage sur ce blog.

Tugdual Ruellan

« Les valeurs de notre République et de notre démocratie sont violemment attaquées. Vers de nouvelles formes d'engagement et de dialogue avec nos concitoyens »

Par Jean-René Marsac, député



Partager ce site

Suivez-nous
Facebook
Twitter
Rss
Mobile