Il y a Sébastien (*), paraplégique, qui appelle Germaine de temps en temps pour l’aider à se préparer avant d’aller à l’université. Il y a Fatou (*) au rez-de-chaussée. Elle vit seule et peine à se déplacer. Germaine n’hésite pas à aller chercher son fils de sept ans à l’école. Il y a belle lurette que les enseignants la connaissent et lui font confiance. Il y a Youssouf (*) aussi, de la tour d’en face ! Il est aveugle mais adore gratter la terre. Tout comme Germaine, il bénéficie avec sa femme d’un petit lopin de terre dans le jardin familial. Alors, on s’échange de précieux conseils.
A chaque étage, une histoire, une tranche de vie
Au huitième étage, il y a Ahmed (*). Algérien, il vit en France depuis douze ans. Aujourd’hui sans emploi, il souffre d’un handicap psychique. En mars 2023, sans papiers depuis trois ans, il est menacé d’expulsion :
Alors dans la cage 17, on se mobilise. Germaine conserve ses affaires dans sa cave et autorise Ahmed à utiliser son adresse postale. Elle convainc un voisin de l’héberger, le temps que la situation administrative s’améliore. Régulièrement, elle contacte l’assistante sociale pour accélérer les démarches. Les papiers sont finalement signés, Ahmed obtient son titre de séjour mais cherche toujours à réintégrer son logement. Il y a aussi l’histoire de Yasmina (*), tunisienne de 30 ans, arrivée en France en 2017, installée à Nantes deux ans plus tard. Elle se déplace en fauteuil à la suite d’un accident de vélo alors qu’elle était étudiante. Yasmina parvient à faire venir son mari de Tunisie en 2021. Après la naissance de leur fille, Germaine intervient auprès de l’office HLM pour que la petite famille bénéficie d’un T3 à la place de leur T2 devenu trop petit :
« Il n’avait plus un sou pour payer son loyer ! Avec juste l’allocation aux adultes handicapés pour vivre, il n’imaginait pas appeler le 115 et être hébergé en foyer. C’est la rue qui l’attendait… »
Alors dans la cage 17, on se mobilise. Germaine conserve ses affaires dans sa cave et autorise Ahmed à utiliser son adresse postale. Elle convainc un voisin de l’héberger, le temps que la situation administrative s’améliore. Régulièrement, elle contacte l’assistante sociale pour accélérer les démarches. Les papiers sont finalement signés, Ahmed obtient son titre de séjour mais cherche toujours à réintégrer son logement. Il y a aussi l’histoire de Yasmina (*), tunisienne de 30 ans, arrivée en France en 2017, installée à Nantes deux ans plus tard. Elle se déplace en fauteuil à la suite d’un accident de vélo alors qu’elle était étudiante. Yasmina parvient à faire venir son mari de Tunisie en 2021. Après la naissance de leur fille, Germaine intervient auprès de l’office HLM pour que la petite famille bénéficie d’un T3 à la place de leur T2 devenu trop petit :
« Ils n’avaient plus où se retourner ! J’ai lancé une pétition et tout le monde dans l’immeuble a signé ! Le changement a finalement été accepté. Depuis, je les aide lorsqu’ils ont besoin d’un coup de main, il n’est pas rare que j’aille chercher la petite à la crèche. Yasmina attend un deuxième enfant… »
La Banane, quartier Malakoff à Nantes.
Entrée au couvent à l’âge de 16 ans
Ainsi va la vie dans la cage 17. Les services sociaux et les aides de vie ne suffisent pas toujours alors on se passe le mot : « Si tu as besoin d’un coup de main, va voir Germaine ! Elle saura t’aider. » Germaine est née en 1941 pendant la guerre. Originaire de Issé, dans le pays de Châteaubriant, elle est la cinquième d’une famille de dix enfants dont sept filles. Alors qu’elle n’a que seize ans, ses parents, paysans, la placent au couvent de Saint-Etienne-de-Montluc, chez les sœurs de l’Immaculée du Mont Carmel, un ordre catholique contemplatif. Ce n’est pas vraiment son choix mais Germaine est docile. A l'âge de 25 ans, la communauté lui permet de suivre une école d’infirmière. Germaine commence alors à travailler comme religieuse en soins à domicile avant d’obtenir un poste à l’hôpital. Mais au bout de trente ans, d'une vie de religieuse, un bouleversement la traverse…
Germaine conserve son emploi à l’hôpital et bénéficie ainsi d’un revenu. Tandis qu’elle découvre l’autonomie et doit vite apprendre à ne plus compter que sur elle-même, elle bénéficie d’un logement HLM et s’installe dans un appartement du quartier Malakoff. Elle s’engage dans diverses actions conduites dans le quartier comme celles du centre social, participant aux loisirs, aux sorties, à l’accompagnement scolaire.
Partager un bref instant de nos vies
« Je me suis éveillée et j’ai commencé à ruer dans les brancards ! Tout était enfin devenu clair. Ma place n’était plus dans ce couvent. J’ai décidé de quitter la communauté le 8 septembre 1990, j’avais 50 ans ! Sans un sou, pas de logement, aucune aide… »
Germaine conserve son emploi à l’hôpital et bénéficie ainsi d’un revenu. Tandis qu’elle découvre l’autonomie et doit vite apprendre à ne plus compter que sur elle-même, elle bénéficie d’un logement HLM et s’installe dans un appartement du quartier Malakoff. Elle s’engage dans diverses actions conduites dans le quartier comme celles du centre social, participant aux loisirs, aux sorties, à l’accompagnement scolaire.
Partager un bref instant de nos vies
Arrivée en retraite, elle poursuit son engagement à l’Action catholique, auprès de l’association Enfance et partage accompagnant des enfants violés ou violentés. En 2008, elle déménage quelques mètres plus loin et s’installe au n°17 de la Banane. Indifférente ? Impossible pour Germaine. Elle a ce sourire qui rassure, cette gentillesse qui enveloppe. Son dernier combat : alerter les élus pour que plus personne ne meure seul dans son appartement…
« Je suis restée avec cette souffrance de ne pas avoir fondé de famille. Mais j’ai conservé malgré tout cette foi qui m’anime chaque jour de ma vie. J’ai envie d’être utile, solidaire face à la souffrance qui m’entoure. Je laisse la vie s’écouler ainsi, simplement, naturellement. Jamais je ne force la porte. La solidarité s’installe dans nos quotidiens, les liens d’amitié se renforcent. On vit ensemble comme dans un village. Ici, tous les pays de monde se côtoient… Avec nos téléphones, on arrive à se parler et à se comprendre un peu. Suffisamment pour partager un bref instant de nos vies. »
(*) prénoms d’emprunt