2019 03 28 En Suède les générations se croisent pour le climat.mp3 (10.55 Mo)
« Vad ska vi göra ? Rädda klimatet ! När När När ? Nu, nu, nu ! » « Qu’est-ce qu’on va faire ? Sauver le climat ! Quand, Quand, Quand ? Maintenant, maintenant, maintenant ! » Telle une accordéoniste en folie, une fille d’une dizaine d’années plie et déplie sa pancarte en carton à chaque slogan scandé. Au carrefour entre le château du roi et le Parlement suédois, Myntorget, la Place de la monnaie à Stockholm, se remplit petit à petit, là où d'ordinaire se pressent les politiques et les touristes ; et désormais chaque vendredi, quelques manifestant.es pour "sauver le climat".
Dès la rentrée 2018, avec une pancarte, seule assise adossée à un mur, Greta Thunberg a fait la grève de l’école. Cette jeune fille aux longues tresses a tant diffusé son regard sérieux sur les réseaux sociaux, relayé par la presse suédoise et internationale, qu’il a fini par cristalliser toute l’inquiétude des jeunes de sa génération sur la question climatique. Et les pousser, à leur tour, dans la rue ce 15 mars.
Dès la rentrée 2018, avec une pancarte, seule assise adossée à un mur, Greta Thunberg a fait la grève de l’école. Cette jeune fille aux longues tresses a tant diffusé son regard sérieux sur les réseaux sociaux, relayé par la presse suédoise et internationale, qu’il a fini par cristalliser toute l’inquiétude des jeunes de sa génération sur la question climatique. Et les pousser, à leur tour, dans la rue ce 15 mars.
De l’effet de serre à « l’effet Greta Thunberg »
Tandis que les médias suédois parlent de "l'effet Greta Thunberg" et sa "grève de l'école", l'Agence suédoise pour l'éducation (Skolverket) avait prévenu : les élèves absents seront notés absents, pas question de déroger à la règle. Répétée, l’absence peut avoir des conséquences sur les allocations que perçoivent les élèves. « Qu’importe, affirme Linna, 14 ans. Ça en vaut la peine. » Avec l’accord de ses parents, elle a même aménagé un planning, un vendredi toutes les deux semaines.
Les habitués ont mis un pantalon de ski, experts désormais en astuces pour se réchauffer (couvrir en priorité les extrémités du corps, bouger les bras...). Un doux crachin fait des pancartes des aquarelles. Des petites filles sont venues avec un père, une mère ou leur professeur, comme David Clysen, professeur de biologie dans un lycée : « Je trouve qu’on n’en fait pas assez en Suède, assure-t-il. Notre responsabilité en tant que professeur, c’est d’en parler et d’expliquer par exemple les effets de serre. » David explique être confronté au scepticisme de certains élèves qui mettent en question le réchauffement climatique : « On a des discussions sur le fait de se méfier des fake news et d’aller toujours à la source des informations, explique ce prof de biologie. Il faut regarder qui écrit, où, etc. » Avant d'ajouter malicieusement : « Par exemple, doit-on toujours croire un journaliste ? »
« On ne vous a pas écoutés pendant longtemps mais maintenant, on vous écoute ! »
Sur une petite scène, après une chanson de U2 entonnée par une jeune fille avec son père, se succèdent quelques discours. Très vite arrivent les « Grand panthers » : « Nous sommes des grands-parents et sommes inquiets depuis longtemps. » Chaque dernier mercredi du mois, sous le regard placide des gardiens, ils se relaient avec des pancartes de photos de leurs petits-enfants devant le Parlement suédois. L'astuce est de s'y promener à deux, ce qui permet d'échapper à la qualification de manifestation.
« Je crois que je vais pleurer », dit Tove, un chocolat chaud à la main avec son amie Ida. Toutes les deux sont venues, malgré l’absence de soutien de leurs professeurs, sauf un qui « aurait bien voulu venir mais ne pouvait pas car il était nouveau dans l’école. » Elles découvrent les « Grand panthers », et les « grand parents for the future » qui regroupent aussi les « writers for the future »; une ribambelle de groupes à l'image de cette génération de Suédois qui a su et sait toujours s'organiser.
« Le mouvement d'écologie politique n'est pas nouveau », rappelle l'oratrice, se disant heureuse de voir les jeunes s'engager. Mais l’heure est aussi au mea culpa : « On fait partie de la génération qui doit prendre ses responsabilités, déclare l’un des membres. On ne vous a pas écoutés pendant longtemps mais maintenant, on vous écoute ! », sous les applaudissements des jeunes, tandis qu'en parallèle, la manifestation prend de l'ampleur.
« Je crois que je vais pleurer », dit Tove, un chocolat chaud à la main avec son amie Ida. Toutes les deux sont venues, malgré l’absence de soutien de leurs professeurs, sauf un qui « aurait bien voulu venir mais ne pouvait pas car il était nouveau dans l’école. » Elles découvrent les « Grand panthers », et les « grand parents for the future » qui regroupent aussi les « writers for the future »; une ribambelle de groupes à l'image de cette génération de Suédois qui a su et sait toujours s'organiser.
« Le mouvement d'écologie politique n'est pas nouveau », rappelle l'oratrice, se disant heureuse de voir les jeunes s'engager. Mais l’heure est aussi au mea culpa : « On fait partie de la génération qui doit prendre ses responsabilités, déclare l’un des membres. On ne vous a pas écoutés pendant longtemps mais maintenant, on vous écoute ! », sous les applaudissements des jeunes, tandis qu'en parallèle, la manifestation prend de l'ampleur.
Le prof et ces « ados courageux »
Se présentent ensuite les « avocats pour le futur » dont la représentante a solennellement clamé « Je promets que nous allons faire quelque chose » avant d'énumérer les institutions qui pourraient être mobilisées. Pour beaucoup, la possibilité de faire une action en justice est une découverte mais c'est trop abstrait. On entend une adolescente soupirer, écouter poliment et quelques regards plongent sur leurs téléphones. Mais quand vient le représentant des professeurs, c’est le calme plat, oreilles attentives.
Un Ipad à la main, le poing levé, il loue ces « ados courageux » qui se mobilisent pour le climat, rendant hommage comme les précédents à Greta. De la musique enfin, des jeunes aux longs cheveux et tenue complète en jeans se préparent. Près de la scène, trois adolescents avec leur skates discutent, écouteurs dans les oreilles, musique américaine, notamment Tyler the creator, connu pour son label « "Odd future".
Un Ipad à la main, le poing levé, il loue ces « ados courageux » qui se mobilisent pour le climat, rendant hommage comme les précédents à Greta. De la musique enfin, des jeunes aux longs cheveux et tenue complète en jeans se préparent. Près de la scène, trois adolescents avec leur skates discutent, écouteurs dans les oreilles, musique américaine, notamment Tyler the creator, connu pour son label « "Odd future".
Ludvig, Frank et Eliot, fans de skate et de hip-hop, venus manifester avec la toile peinte par Eliot.
La foule, telle une montée des eaux
La matinée et ses participants parsemés laisse place au début d'après-midi avec le raz-de-marée prévu. Le vendredi après-midi étant généralement synonyme de relâche en Suède. Des bouches du métro de la vieille ville se déverse le flot de jeunes gens venus avec leur classe, leurs professeurs, sans doute partis dès la pause déjeuner.
Arrivent aussi les familles avec poussettes et pancartes. De la potache "Stop au climat ! Il faut que ça cesse!" aux plus sérieuses "Une Terre, une chance", "Notre monde, notre avenir", la place de la Monnaie se remplit comme pour symboliser la montée des eaux sur une île inondable. Au bout d'un pic en bois, un globe est surmonté d’une lumière de vélo rouge clignotante. L'ambiance est moins revendicative que festive. Sur la chanson « Revolution » des Beatles lancée à pleins tubes, un énorme ballon en forme de planète sautille sur la foule qui se le renvoie telle une multinationale se renvoyant sa propre responsabilité.
Arrivent aussi les familles avec poussettes et pancartes. De la potache "Stop au climat ! Il faut que ça cesse!" aux plus sérieuses "Une Terre, une chance", "Notre monde, notre avenir", la place de la Monnaie se remplit comme pour symboliser la montée des eaux sur une île inondable. Au bout d'un pic en bois, un globe est surmonté d’une lumière de vélo rouge clignotante. L'ambiance est moins revendicative que festive. Sur la chanson « Revolution » des Beatles lancée à pleins tubes, un énorme ballon en forme de planète sautille sur la foule qui se le renvoie telle une multinationale se renvoyant sa propre responsabilité.
Un mouvement peu exempt de contradictions
Pendant les vacances scolaires de février, la manifestation hebdomadaire a tourné à la réunion de quelques adolescents côtoyant timidement une dizaine de retraités actifs. Où étaient-ils ? « En voyage », nous répond-on sur le ton de l'évidence, au ski ou au soleil comme le veut l’usage, la Thaïlande et les îles Canaries figurant au top de la liste des destinations favorites des Suédois. Quant à la manifestation de ce vendredi 15 mars, les selfies, partages et likes étaient bien sûr de rigueur, chez les ados comme les adultes. Autrement dit, les datacenters et smartphones ont encore bien chauffé, la critique de nos modes de vie actuels n’étant pas la question. Et c’est bien dommage. Il faudrait être plus radical comme l’exprime fort bien, entre autres, le journal anti-productiviste belge Kairos.