2017 12 14 Les Sinagots Glopeur s ou la démocratie en marche.mp3 (14.15 Mo)
Autour de Anne, animatrice théâtre et de Laurence, coordinatrice culturelle, deux « professionnelles », une dizaine de « Sinagots » (habitants de Séné) achèvent leur piquenique dans la cafétéria du « Grain de sel » : moment convivial autour d’un assemblage de tables aux plateaux décorés dans le style Andy Warhol. « Elles sont belles, nos tables pop art du Hang’Art non ! » me lance Laurence au moment où les personnes attablées se dispersent aux quatre coins du hall. Elle s’affèrent, qui à l’accrochage d’une exposition des peintres de Nizon, qui au montage du dernier reportage de la « Télé d’ici », qui à la collecte de mystérieux « objets rouges » ?
J’ai sans doute l’air interloqué par ce mouvement précipité. Anne, Sophie, Nicole et Louis-Marie me rassurent. Ils ont bien prévu de passer du temps avec moi pour raconter leur expérience de quatre ans de « culture participative » : des Glops (groupes locaux d’orientation de la programmation) aux journées « Aux œuvres citoyens ! », qui s'ouvrent la semaine prochaine, en passant par le spectacle « Circulez y’a tout à voir ! », qui inaugurait la première saison du centre, ils sont de tous les coups pour apporter leur « Grain de sel ».
J’ai sans doute l’air interloqué par ce mouvement précipité. Anne, Sophie, Nicole et Louis-Marie me rassurent. Ils ont bien prévu de passer du temps avec moi pour raconter leur expérience de quatre ans de « culture participative » : des Glops (groupes locaux d’orientation de la programmation) aux journées « Aux œuvres citoyens ! », qui s'ouvrent la semaine prochaine, en passant par le spectacle « Circulez y’a tout à voir ! », qui inaugurait la première saison du centre, ils sont de tous les coups pour apporter leur « Grain de sel ».
Louis-Marie, Sophie, Anne et Nicole, les quatre Sinagots Glopeurs
A Séné, la première adjointe Anne Philippo Nicolas est chargée de la culture.
Au départ étaient les Glops
« En 2008, la nouvelle équipe municipale avait été élue sur un projet de démocratie participative et pour cela avait créé de nombreuses commissions ouvertes aux citoyens », explique Sophie. De là sont nés les Glops pour associer les habitants qui le voulaient à la programmation du futur équipement culturel.
« Nous allons voir des spectacles, des expositions pour émettre un avis. C’est l’occasion d’une véritable formation, poursuit Nicole. A la fin du spectacle ou de la visite nous discutons avec les artistes et les professionnels de la culture qui nous reçoivent. On peut ainsi étayer notre avis à partir de nos goûts, en saisissant mieux le sens de la création, tout en comprenant les contraintes de diffusion, économiques, techniques… ».
« A un moment nous étions plus de soixante "Glopeurs" venant d’horizons culturels et sociaux différents ». Car la diversité des Glopeurs est un enjeu. En effet, à Séné vivent près de 10 000 habitants sur un territoire étendu et assez éclaté entre la façade maritime, le quartier urbain jouxtant Vannes, un hinterland rural et le bourg. Chacun de ces quartiers se différencie au plan socio culturel et la croissance rapide de la population ne favorise pas forcément le lien social « Longtemps, se rappelle Sophie installée sur la commune il y a 27 ans, on a senti une petite rivalité entre les "Sinagots" de souche et les "hors venus", mais aujourd’hui ça a bien changé ».
Dans un tel contexte, le projet culturel de la municipalité prend tout son sens : comme nous le dira tout à l’heure la première adjointe au maire chargée de l’action culturelle Anne Philippo Nicolas : « Nous voulons "faire culture" avec les habitants pas que pour les habitants ». Cela se traduit dans les objectifs fixés à l'équipe de "grain de sel" par la municipalité : encourager les pratiques collectives, faire du centre culturel un lieu d’échange et de partage, garantir une irrigation culturelle de l’ensemble du territoire... « Et surtout, ce qui est le plus important pour nous, affirment ensemble mes quatre interlocuteurs : éviter de tomber dans l’élitisme culturel ».
Tous les quatre sont engagés dans les Glops depuis le début mais ils n’ont pas pour autant la prétention d’être représentatifs de la population. « On a la chance d’être disponibles ce qui n’est pas toujours le cas quand on travaille et qu’on élève une famille ». Sophie était mère au foyer et tous les trois aujourd’hui sont à la retraite. Quant à Anne, elle a pu dans ce cadre développer son activité professionnelle d’animatrice théâtre. « Les Glops ne sont pas des groupes pérennes et permanents, ça bouge beaucoup. On y a trouvé bien sûr des intellectuels mais aussi des personnes qui jamais n’auraient osé franchir la porte d’un théâtre ou d’une exposition : le dentiste et le compagnon d’Emmaüs » résume Louis-Marie. « Mais c’est faire participer les jeunes qui est peut être le plus difficile », remarquent ensemble Nicole et Sophie. Tout en relativisant tout de suite le phénomène : « C’est moins vrai si on regarde la participation aux activités de la médiathèque - au cœur de grain de sel - où viennent beaucoup de scolaires ». La situation de l'équipement en centre bourg, entre les deux écoles publiques et privées, facilite les choses certainement.
« Nous allons voir des spectacles, des expositions pour émettre un avis. C’est l’occasion d’une véritable formation, poursuit Nicole. A la fin du spectacle ou de la visite nous discutons avec les artistes et les professionnels de la culture qui nous reçoivent. On peut ainsi étayer notre avis à partir de nos goûts, en saisissant mieux le sens de la création, tout en comprenant les contraintes de diffusion, économiques, techniques… ».
« A un moment nous étions plus de soixante "Glopeurs" venant d’horizons culturels et sociaux différents ». Car la diversité des Glopeurs est un enjeu. En effet, à Séné vivent près de 10 000 habitants sur un territoire étendu et assez éclaté entre la façade maritime, le quartier urbain jouxtant Vannes, un hinterland rural et le bourg. Chacun de ces quartiers se différencie au plan socio culturel et la croissance rapide de la population ne favorise pas forcément le lien social « Longtemps, se rappelle Sophie installée sur la commune il y a 27 ans, on a senti une petite rivalité entre les "Sinagots" de souche et les "hors venus", mais aujourd’hui ça a bien changé ».
Dans un tel contexte, le projet culturel de la municipalité prend tout son sens : comme nous le dira tout à l’heure la première adjointe au maire chargée de l’action culturelle Anne Philippo Nicolas : « Nous voulons "faire culture" avec les habitants pas que pour les habitants ». Cela se traduit dans les objectifs fixés à l'équipe de "grain de sel" par la municipalité : encourager les pratiques collectives, faire du centre culturel un lieu d’échange et de partage, garantir une irrigation culturelle de l’ensemble du territoire... « Et surtout, ce qui est le plus important pour nous, affirment ensemble mes quatre interlocuteurs : éviter de tomber dans l’élitisme culturel ».
Tous les quatre sont engagés dans les Glops depuis le début mais ils n’ont pas pour autant la prétention d’être représentatifs de la population. « On a la chance d’être disponibles ce qui n’est pas toujours le cas quand on travaille et qu’on élève une famille ». Sophie était mère au foyer et tous les trois aujourd’hui sont à la retraite. Quant à Anne, elle a pu dans ce cadre développer son activité professionnelle d’animatrice théâtre. « Les Glops ne sont pas des groupes pérennes et permanents, ça bouge beaucoup. On y a trouvé bien sûr des intellectuels mais aussi des personnes qui jamais n’auraient osé franchir la porte d’un théâtre ou d’une exposition : le dentiste et le compagnon d’Emmaüs » résume Louis-Marie. « Mais c’est faire participer les jeunes qui est peut être le plus difficile », remarquent ensemble Nicole et Sophie. Tout en relativisant tout de suite le phénomène : « C’est moins vrai si on regarde la participation aux activités de la médiathèque - au cœur de grain de sel - où viennent beaucoup de scolaires ». La situation de l'équipement en centre bourg, entre les deux écoles publiques et privées, facilite les choses certainement.
"Circulez y'a tout à voir" ou comment faire culture ensemble
Au fil du temps et après l'ouverture du centre culturel, le fonctionnement des Glops s’est un peu essoufflé. La programmation est assurée par un comité de programmation tripartite : des représentants des habitants issus des Glops, des élus, des professionnels. Ainsi est-on un peu passé d'une démocratie culturelle participative à un démocratie culturelle plus représentative. «Voila pourquoi, explique Anne, la coordonnatrice culturelle Laurence a proposé d'aller au-delà de la programmation et de faire participer les habitants à la création même ». C’est ainsi qu’est née l’idée du spectacle « Circulez y’a tout à voir » dans la perspective d’associer habitants et artistes à la création d’une œuvre théâtrale pour l’ouverture du centre.
Nicole et Louis-Marie se souviennent : « L’écrivain Gérard All est venu chez nous, s’est assis à notre table. On a échangé sur notre façon de voir, de vivre. Deux mois après, il nous a reçu et nous a lu le script de nos échanges dont il a extrait à peu près un tiers. Les dialogues du spectacle c’était nos paroles. On a été amené à les redire, et à jouer, d’abord devant les autres membres du groupe (une trentaine d’habitants qui s’étaient livrés au même jeu) et puis, et ce n’était pas le plus facile, devant les spectateurs. Plus de 300 habitants de la commune ont assisté à la représentation. »
Anne commente : « Nous racontions, en les scénarisant, des histoires extraordinaires de gens ordinaires de la commune ». Sophie, elle, n’était alors que spectatrice : « Cela a été un vrai événement. Nous étions étonnés de voir et entendre ce que nous racontaient ces gens que l’on connaissait. J’ai vécu un grand moment d’émotion ». « L’écrivain, souligne Anne qui a elle même assuré la mise en scène, a su décaler le propos. Inventer une histoire collective à partir des histoires singulières. » Ce que confirment le couple Nicole et Jean : « Sur scène, nous étions Mr. Hulot et sa femme. Une dame du CCAS jouait la fée qui veut sauver tout le monde ».
Nicole et Louis-Marie se souviennent : « L’écrivain Gérard All est venu chez nous, s’est assis à notre table. On a échangé sur notre façon de voir, de vivre. Deux mois après, il nous a reçu et nous a lu le script de nos échanges dont il a extrait à peu près un tiers. Les dialogues du spectacle c’était nos paroles. On a été amené à les redire, et à jouer, d’abord devant les autres membres du groupe (une trentaine d’habitants qui s’étaient livrés au même jeu) et puis, et ce n’était pas le plus facile, devant les spectateurs. Plus de 300 habitants de la commune ont assisté à la représentation. »
Anne commente : « Nous racontions, en les scénarisant, des histoires extraordinaires de gens ordinaires de la commune ». Sophie, elle, n’était alors que spectatrice : « Cela a été un vrai événement. Nous étions étonnés de voir et entendre ce que nous racontaient ces gens que l’on connaissait. J’ai vécu un grand moment d’émotion ». « L’écrivain, souligne Anne qui a elle même assuré la mise en scène, a su décaler le propos. Inventer une histoire collective à partir des histoires singulières. » Ce que confirment le couple Nicole et Jean : « Sur scène, nous étions Mr. Hulot et sa femme. Une dame du CCAS jouait la fée qui veut sauver tout le monde ».
Le grain de sel, centre culturel médiathèque ouvert en 2012
Accrochage des œuvres de Nizon
Quand les Glops crient "Aux œuvres citoyens", tout est possible
Aujourd’hui le « Grain de sel » - le nom a été choisi par les glops - a acquis sa vitesse de croisière et propose une programmation soutenue et diversifiée. La municipalité alloue un budget annuel de 70 000 € pour l’achat de spectacles et d’expositions (au-delà des frais de personnel et des coûts d'exploitation). Et les nombreuses et dynamiques associations locales y ont trouvé leur place. Elles assurent une partie des manifestations.
Alors les Glops ont pris une nouvelle dimension pour poursuivre la démarche de culture participative. Un temps fort d’action culturelle leur sera réservé chaque année. Ils décideront du programme d’une part en cherchant et sélectionnant des spectacles et des évènements culturels répondant au critère d’œuvre participative : « quand les habitants créent avec les artistes ». D’autre part, en suscitant l’expression artistique des « Sinagots » dans la dynamique de « Circulez y'a tout à voir ».
Depuis plusieurs mois donc, Anne, Sophie, Nicole et Jean Louis, avec des dizaines d’autres bénévoles, coordonnés par Laurence, sont engagés dans l’aventure des journées « Aux œuvres citoyens ». Tout est dans le titre : appeler les citoyens à créer leurs œuvres, à s’emparer des œuvres, à voir et comprendre aussi comment et pourquoi d’autres, ailleurs, l’ont fait.
Alors les Glops ont pris une nouvelle dimension pour poursuivre la démarche de culture participative. Un temps fort d’action culturelle leur sera réservé chaque année. Ils décideront du programme d’une part en cherchant et sélectionnant des spectacles et des évènements culturels répondant au critère d’œuvre participative : « quand les habitants créent avec les artistes ». D’autre part, en suscitant l’expression artistique des « Sinagots » dans la dynamique de « Circulez y'a tout à voir ».
Depuis plusieurs mois donc, Anne, Sophie, Nicole et Jean Louis, avec des dizaines d’autres bénévoles, coordonnés par Laurence, sont engagés dans l’aventure des journées « Aux œuvres citoyens ». Tout est dans le titre : appeler les citoyens à créer leurs œuvres, à s’emparer des œuvres, à voir et comprendre aussi comment et pourquoi d’autres, ailleurs, l’ont fait.
Dernière main au reportage sur "Carmen ou presque"
Voir la "TV d'ici", le temps d'une Open soupe
Voilà donc l’explication de l’activité intense qui règne cet après-midi dans le Hall du Grain de Sel. D’ailleurs, Louis-Marie, Nicole, Sophie et Anne, au bout d’une heure d’entretien, ne tiennent plus assis. Ils m’entraînent pour une photo de groupe autour de tables couvertes d’objets rouges. « Nous avons invité les habitants, explique Sophie, à collecter des objets rouges du quotidien et ainsi à participer à l’édification d’une œuvre monumentale qui envahira "Grain de sel" tout au long de la semaine. » Dans le même esprit, chaque soir à la cafétéria ce sera « open soupe ». Un temps de rencontre autour de la fabrication et la dégustation de soupes cuisinées avec les légumes apportés par chacun. L’occasion de visionner et discuter les reportages de la « télé d’ici ».
Alors que nos quatre glopeurs ont rejoint Yves Quentel, président du Hang'Art, venu superviser l’accrochage de l’exposition des œuvres des peintres de Nizon, dans le studio vidéo attenant au hall, deux personnes achèvent le montage d’un reportage. Il présentera la semaine prochaine, lors d'un open soupe, les étapes de création de « Carmen ou presque », un des spectacles soutenu par les Glops, réunissant une soixantaine de chanteurs et comédiens amateurs rassemblés par une chef de chœur vannetaise passionnée par l'œuvre de Bizet.
Alain JAUNAULT
Alors que nos quatre glopeurs ont rejoint Yves Quentel, président du Hang'Art, venu superviser l’accrochage de l’exposition des œuvres des peintres de Nizon, dans le studio vidéo attenant au hall, deux personnes achèvent le montage d’un reportage. Il présentera la semaine prochaine, lors d'un open soupe, les étapes de création de « Carmen ou presque », un des spectacles soutenu par les Glops, réunissant une soixantaine de chanteurs et comédiens amateurs rassemblés par une chef de chœur vannetaise passionnée par l'œuvre de Bizet.
Alain JAUNAULT
Les peintures Pop Art, à la Andy Wharol , œuvres des habitants de Nizon( 29)
Demandez le programme
A la date où nous paraissons il reste deux jours pour participer aux journées "Aux œuvres citoyens ".
La dernière journée, Samedi 22 Novembre, sera consacrée à la réflexion sur ces nouvelles façons de "faire culture ensemble".
- de 10 h à 12 h : échanges croisés d'expériences participatives.
- de 16 h 30 à 18 h : table ronde des élus, avec la complicité de la FNCC (Fédération nationale des collectivités pour la culture).
La dernière journée, Samedi 22 Novembre, sera consacrée à la réflexion sur ces nouvelles façons de "faire culture ensemble".
- de 10 h à 12 h : échanges croisés d'expériences participatives.
- de 16 h 30 à 18 h : table ronde des élus, avec la complicité de la FNCC (Fédération nationale des collectivités pour la culture).
"Quand on nous propose un si bel outil, "ça vaut le coup de l'investir, non ?"
Pour en savoir plus
Sur Séné :
sur wikipédia
Le site de la commune
Sur le Hang'Art de Nizon : le site de l'association
Sur la FNCC : le site
sur wikipédia
Le site de la commune
Sur le Hang'Art de Nizon : le site de l'association
Sur la FNCC : le site
Objets rouges du quotidien