C’est l’automne à Montreuil. Le discours de Jean-Marc Gerbeau sur son engagement citoyen est grave, mais il a aussi beaucoup d'humour. Ses propos n’engagent que lui. Il revendique simplement le droit de pouvoir exprimer sa vision du monde, « sa » réalité. Fort de son engagement dans le quartier populaire, où sa compagne et lui ont choisi de rester en famille et de militer bien que rien ne les y oblige, il évoque son parcours.
Les parents de Jean-Marc sont montés du sud-ouest à Paris, où il est né, dans les années 60, pour trouver du travail : « On habitait à Aubervilliers et la banlieue c’est mon truc avec en même temps une culture de village de campagne. »
Les parents de Jean-Marc sont montés du sud-ouest à Paris, où il est né, dans les années 60, pour trouver du travail : « On habitait à Aubervilliers et la banlieue c’est mon truc avec en même temps une culture de village de campagne. »
La province, la banlieue et l’après 68 comme modèles
Première expérience militante à 16 ans. Il est élève au lycée Chaptal à Paris d’où part la première mobilisation lycéenne d'envergure après les événements de 68 : l’affaire Guiot , étudiant emprisonné. Puis c’est la mort de Pierre Overney, militant ouvrier d'extrême-gauche. Enfin, la loi Debré soulève la jeunesse française. Il s’inscrit dans tous ces mouvements lycéens et est même élu président des élèves de son lycée. Il participe aussi à des mouvements culturels, l’associatif lui semblant être une « force nécessaire ».
Il enchaîne sur des études d'économie à l’université Paris Dauphine, va jusqu’en 3° cycle mais ne passe pas son diplôme. L’équipe de Jacques Delors, alors directeur de recherche à Dauphine, lui propose son premier poste : chargé d’études à l'Association pour l'emploi des cadres (APEC). « En 1974, il y avait à 600 000 chômeurs en France et c’était la panique ! » se souvient-il.
Il enchaîne sur des études d'économie à l’université Paris Dauphine, va jusqu’en 3° cycle mais ne passe pas son diplôme. L’équipe de Jacques Delors, alors directeur de recherche à Dauphine, lui propose son premier poste : chargé d’études à l'Association pour l'emploi des cadres (APEC). « En 1974, il y avait à 600 000 chômeurs en France et c’était la panique ! » se souvient-il.
Du Bas au Haut Montreuil
Dans les années 80, Jean-Marc Gerbeau s’installe dans le Bas Montreuil avec sa première compagne. Il participe au montage de l’actuelle crèche associative « Papa poule », s’implique dans le mouvement Vivre à vélo en ville, et participe à la vie citoyenne de son quartier.
Plus tard, il rencontre son actuelle compagne : Diane Logan. Chef monteuse, celle-ci habite une petite maison aux Ruffins, dans le Haut Montreuil, et milite aussi activement dans son quartier : outrée de la décision d’installer une déchetterie sans aucune concertation, elle a commencé à réamorcer le conseil de quartier et Jean-Marc s’y colle aussi.
Ils découvrent alors que c’est compliqué. Ils ont conscience que des intérêts divergents opposent élus, administrations et habitants mais il est des choses qui les interpellent : « L’habitant doit habiter, fermer sa gueule et payer ses impôts, punto basta. Une fois tous les six ans, pendant une seconde, il a un pouvoir magique mais il ouvre les doigts et il a perdu son pouvoir. »
Quand il parle du quartier, d’entrée de jeu, Jean-Marc évoque les populations assignées à résidence dans les grands collectifs prioritaires de la politique de la ville qui l’entourent : « Il faut une force ahurissante quand on imagine ce que des habitants supportent, avec courage. On les montre du doigt et, à côté de ça, on enterre avec les honneurs un grand patron ! » dit-il en faisant référence à la mort de Christophe de Margerie, le patron de Total.
Il pense aux militants traditionnels qui s’impliquent par rigueur militante. Leur combat l’impressionne mais le remplit aussi d’inquiétude : « Ils avalent de ces couleuvres ! »
Plus tard, il rencontre son actuelle compagne : Diane Logan. Chef monteuse, celle-ci habite une petite maison aux Ruffins, dans le Haut Montreuil, et milite aussi activement dans son quartier : outrée de la décision d’installer une déchetterie sans aucune concertation, elle a commencé à réamorcer le conseil de quartier et Jean-Marc s’y colle aussi.
Ils découvrent alors que c’est compliqué. Ils ont conscience que des intérêts divergents opposent élus, administrations et habitants mais il est des choses qui les interpellent : « L’habitant doit habiter, fermer sa gueule et payer ses impôts, punto basta. Une fois tous les six ans, pendant une seconde, il a un pouvoir magique mais il ouvre les doigts et il a perdu son pouvoir. »
Quand il parle du quartier, d’entrée de jeu, Jean-Marc évoque les populations assignées à résidence dans les grands collectifs prioritaires de la politique de la ville qui l’entourent : « Il faut une force ahurissante quand on imagine ce que des habitants supportent, avec courage. On les montre du doigt et, à côté de ça, on enterre avec les honneurs un grand patron ! » dit-il en faisant référence à la mort de Christophe de Margerie, le patron de Total.
Il pense aux militants traditionnels qui s’impliquent par rigueur militante. Leur combat l’impressionne mais le remplit aussi d’inquiétude : « Ils avalent de ces couleuvres ! »
La double exclusion
Et puis, il y a les gens qui ont « son profil », revendiquent le droit à une qualité de vie partagée et, surtout, au respect des habitants qui fait souvent défaut dans les cités. Parce que, dans les quartiers du Haut Montreuil, on est dans la double exclusion : « Montreuil est à deux étages, deux vitesses, deux zones, deux… On paie cher le fait d’être plus loin. Je trouve cela juste insupportable. On est dans une cité dortoir, on n’a pas les boutiques de proximité nécessaires ; une famille doit payer plus cher pour ses déplacements ! »
Depuis que Diane et Jean-Marc sont aux Ruffins, trois couleurs politiques se sont succédées. Si Diane a pris quelque distance avec le militantisme de quartier depuis l'arrivée d'une petite fille, les Ruffins n’ont pas changé et Jean-Marc Gerbeau, tout en gérant sa société de location de bateaux, persiste. Il fait des aller-retour entre Saint-Cloud, dans la banlieue ouest, siège de Cool Sailing, et son quartier populaire des Ruffins.
Depuis que Diane et Jean-Marc sont aux Ruffins, trois couleurs politiques se sont succédées. Si Diane a pris quelque distance avec le militantisme de quartier depuis l'arrivée d'une petite fille, les Ruffins n’ont pas changé et Jean-Marc Gerbeau, tout en gérant sa société de location de bateaux, persiste. Il fait des aller-retour entre Saint-Cloud, dans la banlieue ouest, siège de Cool Sailing, et son quartier populaire des Ruffins.
« On laisse pas dire de mensonges »
Il insiste : « On est des empêcheurs de tourner en rond : ce n’est pas un combat, mais on laisse pas dire de mensonges. » S'il estime avoir peu de pouvoir d’action, il a la parole, peut réfléchir, aiguillonner. Il a investi le conseil de quartier, le conseil consultatif de la vie locale. Il ne veut pas qu’on raconte d’histoires aux habitants : « Les élus revendiquent d’appliquer la démocratie, alors on veut être informé de ce qui se passe sur le quartier, on veut un droit d’expression. »
Le conseil de quartier des Ruffins, malgré « des bâtons dans les roues », continue à fonctionner de manière non institutionnelle. Mais il considère que ce n’est pas vraiment concluant : « On a fait un journal, tapé du poing sur la table : quand t’as pas les moyens de te faire entendre, tu utilises ce que t’as à ta disposition. Mais on n’arrive toujours pas à avoir les informations. On est toujours une vitrine aléatoire. C’est épuisant... mais on continue. »
Le conseil de quartier des Ruffins, malgré « des bâtons dans les roues », continue à fonctionner de manière non institutionnelle. Mais il considère que ce n’est pas vraiment concluant : « On a fait un journal, tapé du poing sur la table : quand t’as pas les moyens de te faire entendre, tu utilises ce que t’as à ta disposition. Mais on n’arrive toujours pas à avoir les informations. On est toujours une vitrine aléatoire. C’est épuisant... mais on continue. »
Le difficile exercice démocratique
Jean-Marc évoque un dossier en cours depuis plusieurs années : le tramway à Montreuil. L’enquête publique a eu lieu et la décision est enfin votée. Cela allongera les parcours en voiture pour les habitants des Ruffins. Ils ont accepté la suppression de la bretelle d’autoroute qui permet l’accès à leur quartier, mais comme la circulation dans les 38 ha protégés des murs à pêches sera aussi supprimée, ils seront obligés de faire 2 km supplémentaires : « Sous le mandat précédent, une réunion a mobilisé 500 personnes dans le quartier, les gens se bougent quand même ! Mais on s’est fait traiter de lobby de l’automobile : c’est plus que violent, c’est déplacé, tu traites pas les gens comme ça ! »
Il fait ensuite le lien avec l'équipe en place : « Le maire est sympathique, humain. L’équipe est représentative de la diversité montreuilloise, mais il manque la représentation forte des quartiers. On a celle des partis, mais la base n’est jamais représentée dans des élections comme ça : soit t’es politique, soit t’es intello. »
Jean-Marc Gerbeau ne remet pas en cause les seuls politiques : il considère qu’aujourd’hui on arrive au bout d’un système, qu’il va y avoir un point de rupture. Il évoque ce qu’il juge inopérant à résoudre les problèmes de fond : le Grand Paris qui va tirer la banlieue vers le bas, la vision centralisée de la France, la professionnalisation des élus, le manque de vision prospective de la politique de la ville, la structure communale qui fonctionne mal, etc.
Il enrage de voir des gisements d’intelligence inexploités : « Le mot vertu ? Oublié ! Pourtant c’est pas compliqué : juste un poil de rigueur, un politique qui se demande comment et pourquoi on en est arrivé là. Faire un bilan, quand même, c’est le rôle du politique dans une ville ! »
Il fait ensuite le lien avec l'équipe en place : « Le maire est sympathique, humain. L’équipe est représentative de la diversité montreuilloise, mais il manque la représentation forte des quartiers. On a celle des partis, mais la base n’est jamais représentée dans des élections comme ça : soit t’es politique, soit t’es intello. »
Jean-Marc Gerbeau ne remet pas en cause les seuls politiques : il considère qu’aujourd’hui on arrive au bout d’un système, qu’il va y avoir un point de rupture. Il évoque ce qu’il juge inopérant à résoudre les problèmes de fond : le Grand Paris qui va tirer la banlieue vers le bas, la vision centralisée de la France, la professionnalisation des élus, le manque de vision prospective de la politique de la ville, la structure communale qui fonctionne mal, etc.
Il enrage de voir des gisements d’intelligence inexploités : « Le mot vertu ? Oublié ! Pourtant c’est pas compliqué : juste un poil de rigueur, un politique qui se demande comment et pourquoi on en est arrivé là. Faire un bilan, quand même, c’est le rôle du politique dans une ville ! »
Le complexe du pauvre et une vraie colère
Lorsqu’il se réfère à son expérience, Jean-Marc constate qu’on ne s’improvise pas citoyen : on le devient. Mais, pour être représentatif dans la cité, il faut dépasser le « complexe de pauvre », « oser » parler : « Excusez moi, je vais vous déranger… C’est violent quand même ! Quand on a compris, ça peut devenir un exercice rigolo... »
Il constate que l’humiliation devient insupportable, que la tension monte : « Mais pourquoi les pauvres n’auraient-ils droit qu’à de la merde ? » Il craint que la situation ne puisse se résoudre que dans la violence, comme souvent, dit-il, en évoquant 1789 et 1848 : « Il faut une vraie colère. Je ne crois plus que, sagement, on puisse se réunir et se dire qu’on doit faire, tous ensemble, quelque chose. »
Il constate que l’humiliation devient insupportable, que la tension monte : « Mais pourquoi les pauvres n’auraient-ils droit qu’à de la merde ? » Il craint que la situation ne puisse se résoudre que dans la violence, comme souvent, dit-il, en évoquant 1789 et 1848 : « Il faut une vraie colère. Je ne crois plus que, sagement, on puisse se réunir et se dire qu’on doit faire, tous ensemble, quelque chose. »
Balayer devant sa porte
Face à ce constat qui peut sembler désabusé, Jean-Marc revendique la lucidité. A 18 ans, il était persuadé que sa génération allait faire changer le monde : « On était dans une perspective différente de celle des générations qui se sont foutu sur la gueule, ni aussi rapaces et destructrices qu'elles ont pu l’être. » Il déplore que nombre de ses camarades ont suivi le modèle parental et que lui-même n’a pas réussi à faire changer le monde…
Du coup, ses ambitions ont aussi évolué: « Je ne peux pas faire changer le monde, mais, dans le petit monde qui m’entoure, je peux essayer de distiller quelque chose qui ébranle les certitudes. Alors, j’aurai balayé un peu devant ma porte, même s’il n’y a rien à gagner… »
Du coup, ses ambitions ont aussi évolué: « Je ne peux pas faire changer le monde, mais, dans le petit monde qui m’entoure, je peux essayer de distiller quelque chose qui ébranle les certitudes. Alors, j’aurai balayé un peu devant ma porte, même s’il n’y a rien à gagner… »
2014, une tentative d’engagement politique
On a régulièrement proposé à Jean-Marc un engagement politique. Il a toujours refusé. Mais, en 2014, deux têtes de liste le sollicitent. Une liste autonome lui offre de s’impliquer sur les transports, l’économie et la démocratie locale. Alors, même s’il affirme en riant qu’il déteste les qualificatifs que les politiques accolent au concept de démocratie, il accepte d’en être.
Sept listes de gauche et une de droite au premier tour. Au second, avec les alliances, quatre listes de gauche, dont celle sur laquelle il est inscrit. « On s’est maintenu pour l’honneur mais, avec presque 10 % des voix, on a obtenu que deux sièges. »
Alors, comme il n’est pas élu et qu’il vient de vendre sa société de location de bateaux, Jean-Marc Gerbeau réendosse ses habits de militant : « Je pense qu’il faut repartir sur de plus petites structures que le conseil de quartier, sur des modes associatifs de micro quartiers, d’îlots. Je réfléchis là-dessus avec deux de mes voisins... »
Dominique Crestin
Sept listes de gauche et une de droite au premier tour. Au second, avec les alliances, quatre listes de gauche, dont celle sur laquelle il est inscrit. « On s’est maintenu pour l’honneur mais, avec presque 10 % des voix, on a obtenu que deux sièges. »
Alors, comme il n’est pas élu et qu’il vient de vendre sa société de location de bateaux, Jean-Marc Gerbeau réendosse ses habits de militant : « Je pense qu’il faut repartir sur de plus petites structures que le conseil de quartier, sur des modes associatifs de micro quartiers, d’îlots. Je réfléchis là-dessus avec deux de mes voisins... »
Dominique Crestin
Des Hauts sans des Bas (débats ?)
OU VADE MECUM DE L'HABITANT DU HAUT MONTREUIL
OU VADE MECUM DE L'HABITANT DU HAUT MONTREUIL
À L'USAGE DE L'HABITANT DU BAS MONTREUIL
(petite leçon de logique centripète par Jean-Marc Gerbeau)
L'habitant du Haut Montreuil se distingue principalement de l'habitant du Bas Montreuil en ce qu'il habite… le haut. Le Haut c'est là-haut, là où il n'y a plus de métro, là où il n'y a quasi plus de commerçants ni de services publics. Le Haut, quand vous regardez le plan des portes ouvertes des ateliers d'Artistes, c'est là où il n'y a aucun point rouge. Pas que ce soit la ville d'à côté, non, non, c'est juste qu'il n'y en a pas.
Remarquez, dire « le Haut » c'est pas très juste car il y a plusieurs hauts. C'est bien pourquoi ceux d'en Bas y disent « LES Hauts ».
Dans notre « Haut » à nous, on a des pratiques bizarres. Par exemple, pour se déplacer on a le choix entre le bus ou sa voiture. Les plus jeunes et les sportifs se régalent le soir à grimper la côte en vélo ou à pied mais ils sont souvent fatigués après le travail. Alors ils prennent la voiture ou le bus. Sont pas très modernes les habitants du Haut, ils n'ont pas compris que c'est pas bon pour la planète.
Et puis aussi quelle drôle d'idée que de passer 8 jours complets chaque année dans leur bus pour rentrer chez eux et de payer 220 euros de plus par an pour cela !
Ben oui, il faut 20 minutes pour rejoindre le métro, soit 40 minutes par jour, si tout roule ! Si peu qu'il leur vienne l'idée de le faire un dimanche, comptez une heure en plus (oui mais aller retour !) Donc cela nous fait quelque chose comme 4 heures et demi passées dans le bus chaque semaine ! Sur 47 semaines, cela fait plus de 8 jours pleins (202 heures) si y'a pas de galères ou de prise en otage comme ils disent à la télé !
Il y en a qui aiment tellement le Haut qu'ils y passent chacune de leurs vacances !
Il faut vous dire qu'en Haut il n'y a même pas le métro ! C'est ridicule, non ? En plus le Navigo du Haut il coûte 18 euros par mois de plus qu'en bas ! 220 euros par an de plus que pour ceux qui ont le métro à leur porte !
Car le Haut est en zone 3, parce que c'est plus loin ! Plus loin de quoi ? Du métro !
Prendre un Vélib ? Il n'y en a pas non plus parce que c'est trop loin ! De quoi ? Du métro vous dis- je !
Donc certains habitants du Haut persistent à prendre leur voiture ! Ils n'ont décidément rien compris ces pauvres habitants du Haut !
Heureusement il y a des élus qui pensent à leur bien-être. L’élu est le plus souvent un habitant du Bas qui sait bien ce qui est bon pour celui du Haut. Il circule par exemple en vélo pour donner l'exemple. Notez qu'il ne vient quand même pas dans le Haut tous les jours, ils sont quand même pas fous les gens d'en Bas.
Par exemple dans notre Haut, ils nous ont donné deux élus rien que pour notre bien avec plein de bonnes visions d'habitants du Bas. En plus on a de la chance une des élues s'occupe de la circulation et des transports. Elle va pouvoir nous aider !
Et pour aider les gens du Haut, ils ont pris des mesures. Par exemple ils ont commencé il y a quelques années à vouloir nous décourager d'aller en Bas en voiture. Pour cela ils ont inventé un plan de circulation qui fait des zigzags. Comme cela, se disaient-ils, les gens du Haut vont avoir le mal de mer et ainsi vont moins venir en Bas. Mais c'était pas assez radical, les gens du Haut, en dépit de leur début de nausée, continuaient à prendre leur voiture et à vouloir venir en Bas.
Faut dire qu'en Haut, y'a pas de cinéma, ni de piscine et, jusqu'à pas si longtemps, pas de supermarché ou de commerçants ni de mairie annexe.
Ah oui, il faut vous expliquer : quand on habite en Bas, on va travailler, on rentre chez soi et on va, par exemple, faire ses courses. C'est bien pratique, il y a G20, Monoprix, Carrefour, Picard, Casino, un centre commercial avec poissonnerie, boucherie, légumes, coiffeur, chaussures, lunettes, vêtements, etc. De tout ! Et on peut choisir son boulanger, normal quoi, et puis en Bas on a bien compris qu'aller à pied c'est vraiment bon pour soi et pour la planète.
Et puis les enfants y z'ont plein d'activités à côté, théâtre, piscine, cinéma, bibliothèque, et même un conservatoire. Tout sous la main, au bout de leurs pieds.
C'est pas pareil en Haut ! On peut pas choisir son boulanger (excellent par ailleurs) ni son boucher, qui n'existe pas, il faut prendre le bus ! Les gens d'en Bas, il leur viendrait pas à l'esprit de prendre le bus pour acheter leur viande ! Sont pas stupides les gens d'en Bas.
Alors il fallait agir et vite. Et il y eu une idée : supprimer l’autoroute, comme cela le dernier avantage à prendre sa voiture disparaîtra. Oui, figurez-vous qu'en Haut ils ont une bretelle d'autoroute qui a été construite il y a pas si longtemps pour vider plus vite la ville. Pas le Bas, la Ville, la Vraie Ville... Paris.
A cette époque, c'était une excellente idée des élus du Bas de l'époque, mais plus maintenant ! Pourtant, c'est pas mal de rentrer vite chez soi le soir après une visite chez des amis à la Ville, en 5 minutes, hop au dodo ! Si on devait prendre les transports en commun c'est une bonne heure avec de la chance ! Plus vite que d'aller au milieu du Bas ! Et toc !
Mais c'est pas bien. Alors, aussitôt pensé aussitôt décidé. Après une profonde concertation entre les gens d'en Bas, les gens d'en Bas ont pensé que puisqu'il y avait un tramway pour aller encore plus loin en banlieue on pourrait se débarrasser de cette construction qui coupe la ville en deux (le tramway coupe moins, il paraît ?) et, au passage, supprimer la circulation des voitures le long du tracé au sein des « murs à pêche ».
Les élus d'en Bas et des association de défense ont décidé que les murs à pêche c'est plus important que les gens qui vivent autour.
Les murs à pêches c'est pas un quartier avec des gens dedans, non, c'est des murs où il n'y a même plus de pêches mais que c'est dans « not' mémoire à tous » (surtout ceux d'en Bas d'ailleurs) et que un tramway, c'est bien, mais laisser une voie de circulation à côté c'est une hérésie. Les murs, les murs voyons ! Sauvons les murs ! Mais au fait où sont les pêches ?
Alors ils ont dit que les gens d'en Haut qui ne veulent pas passer 8 jours dans le bus n'ont qu'à se débrouiller et faire le détour. Sont quand même pas à 5 minutes près non les gens d'en Haut ?
Ah ! Là, c'est imparable parce que si on est plus loin c'est parce qu'on est pas tout près, que si on est pas près c'est que l'on a le temps et que notre temps à nous, gens du Haut, vaut moins que ceux qui savent ce qui est bon pour nous. CQFD !
Pourtant, si on fait un rapide calcul en multipliant par 5 le temps de voiture, ne multiplie-t-on pas également la consommation ? Et que le bilan n'est peut être pas bon à l'arrivée ?
Et les gens qui vivent le long des routes où va passer le trafic, ils sont content ?
Remarquez, moi je dis cela mais qu'est-ce que j'en sais... Je suis comme eux... J'habite le Haut !