«J’ai découvert, en observant ce qui se passe dans mon village, une décoction de plante pour remplacer l’acide»
« Je suis né il y a environ 35 ans au village de Harikanassou alors que Seyni Kountché était président. J’ai eu de la chance parce que le collège était gratuit et que j’ai bénéficié de l’enseignement des derniers coopérants français. Ils étaient durs et exigeants mais ils étaient forts en didactique. Ils nous ont mis dans la tête que c’est par l’école et le travail qu’on arrive à être quelqu’un. J’ai eu une chance incroyable. » Aujourd’hui, Moussa Issoufou a quitté son Niger natal et est professeur à l’athénée royal de Bastogne-Houffalize en Belgique.
Une mission à remplir
« J’ai eu des possibilités pour travailler comme ingénieur au Luxembourg. J’ai refusé car je dois poursuivre ma mission : enseigner, faire de la recherche et voir ce que je peux faire pour le Niger. »
Et il s’y emploie. Il travaille sur la didactique des sciences. « Au Niger, explique-t-il, on manque de matériel pour enseigner, les élèves ne peuvent faire des expériences et doivent écouter des cours uniquement théoriques. Je peux améliorer les choses en proposant des expériences chimiques accessibles aux enseignant nigériens qui n’ont aucun matériel pour fonctionner. Par exemple, j’ai découvert, en observant ce qui se passe dans mon village, une décoction de plante pour remplacer l’acide. Le Niger peut mettre ainsi son potentiel en valeur, faire des économies sur le matériel éducatif et les élèves comprendront mieux.»
Moussa va rentrer au pays pendant les grandes vacances. Un protocole d’accord avec le ministère de l’Éducation pour constituer un comité de pilotage est en cours. Il réunira des enseignants de la diaspora en poste en France et en Belgique, des chercheurs de l’université de Niamey et des enseignants. « L’objectif sera de créer un manuel pour les professeurs afin de les former aux expériences et au matériel que j’ai élaborés pour animer les cours. Parallèlement, nous proposerons une formation. »
Et il s’y emploie. Il travaille sur la didactique des sciences. « Au Niger, explique-t-il, on manque de matériel pour enseigner, les élèves ne peuvent faire des expériences et doivent écouter des cours uniquement théoriques. Je peux améliorer les choses en proposant des expériences chimiques accessibles aux enseignant nigériens qui n’ont aucun matériel pour fonctionner. Par exemple, j’ai découvert, en observant ce qui se passe dans mon village, une décoction de plante pour remplacer l’acide. Le Niger peut mettre ainsi son potentiel en valeur, faire des économies sur le matériel éducatif et les élèves comprendront mieux.»
Moussa va rentrer au pays pendant les grandes vacances. Un protocole d’accord avec le ministère de l’Éducation pour constituer un comité de pilotage est en cours. Il réunira des enseignants de la diaspora en poste en France et en Belgique, des chercheurs de l’université de Niamey et des enseignants. « L’objectif sera de créer un manuel pour les professeurs afin de les former aux expériences et au matériel que j’ai élaborés pour animer les cours. Parallèlement, nous proposerons une formation. »
Le professeur nigérien au milieu de ses élèves belges
Le chercheur
Moussa Issoufou est aussi chercheur à l’université libre de Bruxelles. Il y rencontre d’autres chercheurs et il ne comprend pas : quand il regarde les cartes du Niger, il voit la richesse de son pays. Et il ne comprend pas pourquoi il y a toujours la famine. « Quand je vois les tonnes de phosphate, je me dis qu’il y a quelque chose qui ne va pas. » Certes les terres sont pauvres, certes l’agriculture n’est pas mécanisée, mais ce n’est pas une raison pour laisser aux seuls Peuls, avec leurs animaux, le soin de la fertilisation.
Moussa cherche la dissolution de phosphate qui permettra de fertiliser le sol. « J’ai d’abord commencé par analyser le sol pour voir les réactions, parce que si le phosphate n’arrive pas à se dissoudre avec le sable, cela ne sert à rien. Je suis à ce stade. Mes amis me disent que j’en fais trop. Mais si j’arrive avec les résultats que j’ai, à fertiliser cinq hectares, c’est déjà cela ! »
Enseignant, chercheur et aussi un peu professeur Tournesol, Moussa Issoufou travaille dans son laboratoire. Il a acheté une grosse lampe au magasin de bricolage. Tuyaux et bouteilles sur la table, l’eau chauffe et refroidit, l’eau monte et descend. Les différences de températures entre le jour et le nuit, voilà quelque chose que son cerveau bouillonnant veut exploiter pour remonter l’eau si précieuse à la surface. « Cet été, je vais passer à l’expérimentation grandeur nature. Mes calculs théoriques sont prêts. A partir de l’an prochain, je vais encadrer des étudiants de master de l’Université de Niamey. Avec eux, j’avancerai sur le projet. »
Moussa cherche la dissolution de phosphate qui permettra de fertiliser le sol. « J’ai d’abord commencé par analyser le sol pour voir les réactions, parce que si le phosphate n’arrive pas à se dissoudre avec le sable, cela ne sert à rien. Je suis à ce stade. Mes amis me disent que j’en fais trop. Mais si j’arrive avec les résultats que j’ai, à fertiliser cinq hectares, c’est déjà cela ! »
Enseignant, chercheur et aussi un peu professeur Tournesol, Moussa Issoufou travaille dans son laboratoire. Il a acheté une grosse lampe au magasin de bricolage. Tuyaux et bouteilles sur la table, l’eau chauffe et refroidit, l’eau monte et descend. Les différences de températures entre le jour et le nuit, voilà quelque chose que son cerveau bouillonnant veut exploiter pour remonter l’eau si précieuse à la surface. « Cet été, je vais passer à l’expérimentation grandeur nature. Mes calculs théoriques sont prêts. A partir de l’an prochain, je vais encadrer des étudiants de master de l’Université de Niamey. Avec eux, j’avancerai sur le projet. »
«Passons à l'acte»
Travailler avec la diaspora
Cet émigré engagé sur tous les fronts est évidemment aussi un membre actif de la diaspora nigérienne de Belgique. Il y a quelques semaines, ils ont fait la fête. Moussa a eu du bonheur à vivre un bout de Niger à Bruxelles, mais il n’a pas oublié sa mission : il est très actif dans la commission des intellectuels de la diaspora. Et c'est ainsi qu'est née l’idée de créer un lycée « de type belge » au Niger. Une bonne façon d’impliquer les Nigériens sur les problèmes d’éducation, pense Moussa Issoufou, mais aussi « un lycée pilote pour permettre aux jeunes nés loin du pays de poursuivre leurs études tout en vivant dans le pays de leurs ancêtres afin de le comprendre et de participer ainsi à son développement.»
Dans l’association des Nigériens de Belgique, Moussa n’a pas pris de responsabilités particulières. Il préfère rester en retrait pour avoir le temps de travailler sur sa mission. Mais sa vigilance est de tous les instants. Il raconte : « Les Nigériens veulent tous faire quelque chose. Comme tous les gens occupés, on fait beaucoup de discours. On critique, on critique… Un jour, j’ai dit "Passons à l’acte, j’ai une proposition à vous faire. Chacun de nous peut mobiliser 3 000 euros sur un an ou deux. On décide tout de suite : on ne va pas faire de l’humanitaire, on va créer une entreprise. Allez, qu’est-ce qu’on peut faire comme entreprise ?" »
Dans l’association des Nigériens de Belgique, Moussa n’a pas pris de responsabilités particulières. Il préfère rester en retrait pour avoir le temps de travailler sur sa mission. Mais sa vigilance est de tous les instants. Il raconte : « Les Nigériens veulent tous faire quelque chose. Comme tous les gens occupés, on fait beaucoup de discours. On critique, on critique… Un jour, j’ai dit "Passons à l’acte, j’ai une proposition à vous faire. Chacun de nous peut mobiliser 3 000 euros sur un an ou deux. On décide tout de suite : on ne va pas faire de l’humanitaire, on va créer une entreprise. Allez, qu’est-ce qu’on peut faire comme entreprise ?" »
Rentrer là-bas pour être utile
De là est partie l’idée d’acheter un terrain au Niger, d’embaucher des jeunes des villages environnants, d’acquérir des animaux pour les élever et ravitailler les abattoirs. Le projet de la ferme est parti et c’est Abdou, l’agronome, qui va s’en occuper.
« Je veux retourner vivre au Niger où je serai dix mille fois plus utile qu’en Belgique quand il y aura la stabilité politique. Je travaille ici pour accumuler des richesses qui se développeront quand j’y retournerai. » Les paroles de Moussa résonnent : il n’a pas envie de perdre de temps. A l’extérieur de son pays, il observe, il compare, il analyse et cherche ce qui fera avancer le développement. Il propose et mobilise la diaspora qu’il entraîne. «Au Niger, tu sais, on m’appelle le Blanc ; moi, je dis que je travaille comme un nègre», dit-il en rigolant.
« Je veux retourner vivre au Niger où je serai dix mille fois plus utile qu’en Belgique quand il y aura la stabilité politique. Je travaille ici pour accumuler des richesses qui se développeront quand j’y retournerai. » Les paroles de Moussa résonnent : il n’a pas envie de perdre de temps. A l’extérieur de son pays, il observe, il compare, il analyse et cherche ce qui fera avancer le développement. Il propose et mobilise la diaspora qu’il entraîne. «Au Niger, tu sais, on m’appelle le Blanc ; moi, je dis que je travaille comme un nègre», dit-il en rigolant.
Marie-Anne Divet