Il est prés de 23 heures ce 18 Novembre à Pordic. L’assemblée générale qui a installé le Conseil d’administration de l’association des "Jardins de Keribet" vient de s’achever. Je suis invité à me joindre au petit noyau qui a soutenu dés le départ l’initiative de Martine Kerlaouezo, porteuse du projet d'entreprise d'insertion en maraîchage biologique.
Yves Le Mer, président de l’association, nous reçoit chez lui. Sur la table il a dressé un appétissant souper campagnard. Il y a là aussi Gilbert Gaspaillard (Maire de Pordic), Danièle Vaudrey, Jean Luc Freysi, Monique Levée. L’ambiance est chaleureuse. Nous sommes là pour voir comment va se concrétiser la proposition d'Histoires Ordinaires de traiter en feuilleton vidéo le récit de la première année des "Jardins de Keribet".
Pendant plus de deux heures, avec l'enthousiasme des pionniers, ils parlent du projet et aussi de Pordic, creuset social, culturel, historique dont m'apparaissent progressivement les contours. Ainsi l'histoire des jardins sera aussi celle de ses acteurs, ancrés dans l’environnement singulier de Pordic, commune bretonne entre mer et terre, en périphérie de ville.
Une double dimension, sociale et écologique
L'équipe poursuit deux objectifs mêlés : produire et distribuer des légumes bio et faciliter l'accès ou le retour à l'emploi de personnes de la commune, fragilisées sur le marché du travail. En période de croisière l’entreprise livrera chaque semaine à 200 clients particuliers – adhérents de l’association – un panier de légumes bio. Le reste de la production sera écoulée par la supérette implantée sur la commune et approvisionnera la cantine scolaire.
Mais « L’objectif prioritaire s’engagent-ils ensemble, est de placer l’humain au cœur du projet d'entreprise. Les liens tissés autour des paniers et les activités d’animation que nous développerons permettront de redonner confiance et optimisme aux « jardiniers ».
Un terrrain favorable
Martine Kerlaouezo, issue d’une vieille famille pordicaise, a l’expérience nécessaire pour mener à bien ce projet d’entreprise différente. « Je suis une ancienne exploitante maraîchère. J’ai participé à un "Jardin de cocagne" et ai travaillé plusieurs années dans un quartier de Saint Brieuc comme animatrice d’insertion ». Mais ces qualités personnelles ne peuvent suffire pour passer de l’idée des jardins à la réalisation.
Il faut aussi un terrain favorable, dans tous les sens du terme. D’abord un environnement social et politique sensible. « Les journée territoriales de l’insertion qui se sont déroulées en Juin 2009 à Ploufragan ont établi un manque d’entreprises d’insertion sur le bassin d’emploi de Saint Brieuc ». Ce constat a retenu l'attention des élus de l'agglomération.
Ensuite, un potentiel commercial avéré : « la demande du marché local est forte pour des produits issus de l’agriculture biologique. L’offre de proximité en revanche est faible ». Enfin et cela est déterminant, un terrain agricole de bonne dimension, disponible, compatible avec les exigences de la certification bio?
«A la mairie, rappelle Gilbert Gaspaillard, nous nous demandions que faire d’une partie de la zone commerciale que la nouvelle loi concernant les zones humides nous obligeait de déclasser ». Deux parcelles totalisant 27 000 m2 redevenaient donc disponibles pour la culture maraîchère. Le soutien des élus de la commune et de l’agglomération est alors largement acquis.
« Un des enjeux du projet est aussi de démontrer que l’on peut exploiter intelligemment les zones humides, ajoute Yves Le Mer, et nous allons réunir un comité scientifique pour s'assurer de la validité écologique de nos solutions d'aménagement et d'exploitation ».
Parcours du combattant
« Mais c’est un sacré parcours du combattant, constatent ensemble nos six pionniers. «En deux mois j’ai appris une foule de choses. Je ne connaissais rien en management d’entreprise, s'étonne encore Yves. Voilà un an que l’on fournit des dossiers, ajoute Jean Luc. Il faut aller chercher des autorisations dans plusieurs administrations qui ne se connaissent pas et qui défendent chacune leur bout de gras ».
Ensemble ils rient encore de ces tracas, confortés qu’ils sont par le large mouvement d’adhésion dont l’assemblée générale de ce soir a fait le constat. 78 personnes se sont d’ors et déjà engagées à l’achat hebdomadaire d’un panier.
Le projet entre en phase active
Il y a déjà un mois, Martine a procédé aux premiers semis. Au cours des vacances de Noël des adhérents volontaires viendront lui prêter main forte pour monter les serres. La recherche et le recrutement du premier salarié en contrat d’insertion sont prévus dés mi-janvier.
Martine sera rejointe rapidement par un encadrant technique. Ensemble, avec une équipe qui se renforcera progressivement, ils procèderont aux premières plantations sous serre, à l’installation du système d’irrigation et des clôtures, au nettoyage des abords de l’exploitation, au montage des abris de jardin qui serviront de locaux de travail en attendant la construction en dur financée par l’agglomération.
Martine l'a promis tout à l'heure lors de l'assemblée générale : «La première récolte et la distribution des premiers paniers c'est pour avril ».
Tout au long de l'année, "Histoires Ordinaires" rendra compte de chacune de ces étapes sous la forme d’un court vidéo reportage (voir le premier épisode du feuilleton en tête de l'article). En fin d'année, Ils seront rassemblés sous la forme d'un documentaire multimédia.
Alain JAUNAULT