
Marc Roger est un homme de paroles.
Il dit, il parle, il conte et récite, il donne à voir et à entendre rien de moins que le corps du
texte. De poème en poètes, de récits en strophes, il dit les mots là où il se trouve, sur les
caps, sous vergues, dans les forêts, en lisière ou dans les médiathèques, qui sont les phares
et les balises d’aujourd’hui.
Dans le sentiment du littoral qui sort ces temps-ci à La Grange Batelière, Marc Roger nous
présente la famille.
La nôtre.
Loti, Perros, Guilloux, Saint-Pol-Roux, mais aussi Palante ou plein d’oncles plus imposants,
quasi intimidants, ceux qui font peur et qui ne sont pas là tous les dimanches, Hugo, tonton
Victor, ou Oncle Albert, Camus bien sûr, le parrain, Marcel Proust et bien entendu la
marraine, Tata Dudu, Marguerite Duras en personne sans oublier Montaigne, le pater des
paters.
Ils sont tous là et ils ne viennent pas les mains nues.
Marc Roger les trouve sur son chemin.
Il nous donne à parcoulire un road-movie poétique et littoral donc.
Le cahier des charges est énoncé dès le départ du livre. À l’exemple d’Ismaël Bartleboom,
j’irai voir « l’endroit où l’eau s’arrête », là où finit la mer. Je tenais mon voyage. Ne marcher
et ne lire que dans des villes ayant accès direct à la mer via une crique, une falaise, un
estuaire, une plage ou un port, et concernant mon répertoire, ne réunir que des ouvrages
ayant pour thème le littoral et le grand large.
Est-ce que parfois la littérature échappe au littoral et au grand large ? Même urbaine ou
maquisarde, ne traite-t-elle pas au fond que de l’insulaire et de l’océanique, question
ouvertes, posées à l’auteur.
Marc Roger, flâneur de pages, marcheur de vers, ne triche pas. Il nous promène de
Dunkerque au Golfe de Gascogne, de dunes en estrans, de blockhaus graffés en rocs rocks,
tout nous est rendu dans une jolie balade au sens Villonesque même si le forban magnifique
manque à l’inventaire.
Et Rimb ? C’est Marc lui-même, ses semelles sont de vents. Il les chausse, il les chauffe et
enchâsse les mots, les prend délicatement entre deux doigts, dans ses mains qui sont son
bateau ivre.
Toutes les haltes sont belles, douces, peuplées de rencontres avec les auditeurs, les passants
de passage, les amis revisités, les invités ou les oiseaux qui crient du haut des réverbères,
encore ! encore !
Port des Minimes de La Rochelle. Dans une boutique d’accastillage et de vêtements de mer,
je me regarde dans la glace. J’essaie une salopette étanche de marin. Je ne veux plus risquer
la mort dans des vêtements qui ne servent à rien passé une heure sous des trombes d’eau.
Taille XXL. J’y suis à l’aise et le tissu, m’affirme la vendeuse, ne provoque pas de sensation de
type sauna. Enfin, Didier, le compagnon de Sylvette, bibliothécaire bénévole de la
médiathèque La Méridienne de Saint-Médard-d’Aunis, laquelle tient son nom de mon
précédent voyage, Saint-Malo – Bamako avec mon âne Babel, m’offre un ciré de marin
pêcheur dont il n’a plus l’usage.
Le voyage de Marc Roger dure un an.
Il en endure et de tous les vents, brises, bises et pétole !
Chaque chapitre est un mois et on voit qu’il y a des hivers de juillet, des coups de chien
d’équinoxe plus estourbiffants encore et qui nécessitent, avec l’humour toujours, de
s’habiller chaud et s’adapter sévère.
Lire Côtes d’Armor, terre d’écrivains, suffirait pour moi à recommander ce livre !
Ne lire que la page 163 peut suffire !
La lire et relire cette page entre roches et falaises, entre écumes et sable, sous les algues
vertes et les nitrates empoisonnants, il faut ici se promener avec le promeneur, nez en l’air,
éthique à cœur et donc, oui, rester où l’on veut, dans la ria de son choix, l’écouter lire poème
bleu à Tréboul sur la tombe de Georges. Il enjambe le mur dès potron minet, retrouve son
axe avec google-map, les arbres de la photo et la mer en-dessous sont la dalle de Tania et
Georges, il y lit le poème pour les deux gisants qui vivront longtemps. Ou il lit Loti ou Palante
(quel Georges ! je ne puis imaginer ma personnalité distincte de la sienne dit Louis Guilloux)
car nous sommes tous des briochins !
N’importe quoi !
Voilà que je parlais de moi…
Le littoral est plus qu’un sentiment : il justifie l’intérieur. La mer dit la terre et la poésie le
sens.
Lorsque le soleil sombre à l’horizon dans l’océan, personne à cet instant n’aurait l’idée de
regarder la terre.
Gilles Cervera
Marc Roger Le sentiment du littoral éd la Grange Batelière 282 pp Diffusion Harmonia Mundi
Il dit, il parle, il conte et récite, il donne à voir et à entendre rien de moins que le corps du
texte. De poème en poètes, de récits en strophes, il dit les mots là où il se trouve, sur les
caps, sous vergues, dans les forêts, en lisière ou dans les médiathèques, qui sont les phares
et les balises d’aujourd’hui.
Dans le sentiment du littoral qui sort ces temps-ci à La Grange Batelière, Marc Roger nous
présente la famille.
La nôtre.
Loti, Perros, Guilloux, Saint-Pol-Roux, mais aussi Palante ou plein d’oncles plus imposants,
quasi intimidants, ceux qui font peur et qui ne sont pas là tous les dimanches, Hugo, tonton
Victor, ou Oncle Albert, Camus bien sûr, le parrain, Marcel Proust et bien entendu la
marraine, Tata Dudu, Marguerite Duras en personne sans oublier Montaigne, le pater des
paters.
Ils sont tous là et ils ne viennent pas les mains nues.
Marc Roger les trouve sur son chemin.
Il nous donne à parcoulire un road-movie poétique et littoral donc.
Le cahier des charges est énoncé dès le départ du livre. À l’exemple d’Ismaël Bartleboom,
j’irai voir « l’endroit où l’eau s’arrête », là où finit la mer. Je tenais mon voyage. Ne marcher
et ne lire que dans des villes ayant accès direct à la mer via une crique, une falaise, un
estuaire, une plage ou un port, et concernant mon répertoire, ne réunir que des ouvrages
ayant pour thème le littoral et le grand large.
Est-ce que parfois la littérature échappe au littoral et au grand large ? Même urbaine ou
maquisarde, ne traite-t-elle pas au fond que de l’insulaire et de l’océanique, question
ouvertes, posées à l’auteur.
Marc Roger, flâneur de pages, marcheur de vers, ne triche pas. Il nous promène de
Dunkerque au Golfe de Gascogne, de dunes en estrans, de blockhaus graffés en rocs rocks,
tout nous est rendu dans une jolie balade au sens Villonesque même si le forban magnifique
manque à l’inventaire.
Et Rimb ? C’est Marc lui-même, ses semelles sont de vents. Il les chausse, il les chauffe et
enchâsse les mots, les prend délicatement entre deux doigts, dans ses mains qui sont son
bateau ivre.
Toutes les haltes sont belles, douces, peuplées de rencontres avec les auditeurs, les passants
de passage, les amis revisités, les invités ou les oiseaux qui crient du haut des réverbères,
encore ! encore !
Port des Minimes de La Rochelle. Dans une boutique d’accastillage et de vêtements de mer,
je me regarde dans la glace. J’essaie une salopette étanche de marin. Je ne veux plus risquer
la mort dans des vêtements qui ne servent à rien passé une heure sous des trombes d’eau.
Taille XXL. J’y suis à l’aise et le tissu, m’affirme la vendeuse, ne provoque pas de sensation de
type sauna. Enfin, Didier, le compagnon de Sylvette, bibliothécaire bénévole de la
médiathèque La Méridienne de Saint-Médard-d’Aunis, laquelle tient son nom de mon
précédent voyage, Saint-Malo – Bamako avec mon âne Babel, m’offre un ciré de marin
pêcheur dont il n’a plus l’usage.
Le voyage de Marc Roger dure un an.
Il en endure et de tous les vents, brises, bises et pétole !
Chaque chapitre est un mois et on voit qu’il y a des hivers de juillet, des coups de chien
d’équinoxe plus estourbiffants encore et qui nécessitent, avec l’humour toujours, de
s’habiller chaud et s’adapter sévère.
Lire Côtes d’Armor, terre d’écrivains, suffirait pour moi à recommander ce livre !
Ne lire que la page 163 peut suffire !
La lire et relire cette page entre roches et falaises, entre écumes et sable, sous les algues
vertes et les nitrates empoisonnants, il faut ici se promener avec le promeneur, nez en l’air,
éthique à cœur et donc, oui, rester où l’on veut, dans la ria de son choix, l’écouter lire poème
bleu à Tréboul sur la tombe de Georges. Il enjambe le mur dès potron minet, retrouve son
axe avec google-map, les arbres de la photo et la mer en-dessous sont la dalle de Tania et
Georges, il y lit le poème pour les deux gisants qui vivront longtemps. Ou il lit Loti ou Palante
(quel Georges ! je ne puis imaginer ma personnalité distincte de la sienne dit Louis Guilloux)
car nous sommes tous des briochins !
N’importe quoi !
Voilà que je parlais de moi…
Le littoral est plus qu’un sentiment : il justifie l’intérieur. La mer dit la terre et la poésie le
sens.
Lorsque le soleil sombre à l’horizon dans l’océan, personne à cet instant n’aurait l’idée de
regarder la terre.
Gilles Cervera
Marc Roger Le sentiment du littoral éd la Grange Batelière 282 pp Diffusion Harmonia Mundi